Avec Zamir, publié aux éditions Flammarion, Hakan Günday livre un roman qui transforme une réalité rêvée en un cauchemar vécu. Ici, en lieu et place de l’angélisme et des bons sentiments, on ne trouve que noirceur et hypocrisie. Pas très attrayant me direz-vous ? Et bien si. Tant le livre est maîtrisé, percutant, incisif.
Alors l’histoire :
Zamir a six jours lorsqu’une bombe explose à al-Aman, un camp de réfugiés à la frontière turco-syrienne où sa mère l’a abandonné. Il survit, grâce à l’acharnement d’un chirurgien, mais reste défiguré. Élevé par All for All, une organisation humanitaire internationale, il devient un symbole, une image idéale pour collecter des fonds. Jeune adulte, il s’en émancipe pour rejoindre la Fondation pour la Première Paix mondiale et investir un poste clé de négociateur de l’ombre. Partout où un conflit armé est sur le point d’éclater, Zamir se précipite, l’empêche. Il rencontre des ministres, des dictateurs, des terroristes, ne recule devant rien. Pour les forcer à négocier, il les trompe, les fait chanter. Il n’a qu’un seul mot d’ordre : la paix avant tout, quel qu’en soit le prix.
Avec Zamir, Hakan Günday (prix Médicis étranger en 2015) nous questionne. Cette histoire est-elle réelle ? Quand s’est elle déroulée ? Les faits sont ils exagérés à l’extrême ? Bref cette fiction est elle possible ? Evidemment aucune réponse binaire ne sera donnée à ces questions, libre au lecteur de croire à ce réel, ou de le nier. Il n’en reste pas moins que Zamir est un clou enfoncé, avec talent, dans notre vision d’un monde où nos bonnes intentions seraient dénués d’intérêts.
Un livre dérangeant donc, mais un livre utile.
