Exit la berline, finie la citadine, oublié le monospace. Depuis dix ans, il règne en maître sur nos routes. Le SUV est le petit chouchou des conducteurs français. Seulement, cette carrosserie est un véritable désastre écologique et économique. C’est ce que révèle deux études publiées par l’association WWF France ce mardi 6 octobre 2020.
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Tout a commencé en 2007, lorsque Nissan a sorti son Qashqai. Personne n’imaginait à ce moment que ce véhicule ne faisait qu’ouvrir une décennie entièrement orientée vers ce nouveau modèle qu’est le SUV. Mais au fait, qu’est-ce qu’un SUV ? Le SUV, pour Sport Utility Vehicule, est un véhicule de loisir équipé d’une carrosserie de véhicule tout-terrain. Il a l’allure d’un 4×4, mais n’a pas systématiquement 4 roues motrices.
Il a tellement de succès, que le SUV commence à grignoter les autres segments. On a vu des véhicules tels que le Renault Captur et le Peugeot 2008 remplacer la Clio et la 208. Ces minis SUV ont une carrosserie rehaussée, des lignes musclées, mais n’ont rien d’un véhicule tout terrain : pas de capacité de remorquage, de franchissement et pas plus d’espace intérieur. Par contre, ils consomment plus que leurs cousins standards, ce que soulignent deux études publiées par WWF France ce 6 octobre.
Pollueur hors pair
Les SUV sont plus longs (+26 cm), plus larges (+10 cm), plus lourds (+205 kg) et plus puissants (+26 ch) que les autres voitures. Résultat, ce bolide est moins aérodynamique et donc beaucoup plus polluant. En moyenne, il émet 20 % de CO2 de plus que son équivalent standard pour chaque kilomètre parcouru, faisant de lui la deuxième source de croissance des émissions de CO2 françaises ces dix dernières années, juste derrière le secteur aérien. Et la pollution n’est pas réservée à la route. Le SUV pollue durant l’ensemble de son cycle de vie, précise WWF. De la fabrication à sa fin de vie, son empreinte carbone est 1,3 fois supérieure à celle d’une voiture standard et 5,7 fois plus pour une citadine électrique.
Des ventes exponentielles
Qu’importent ces données inquiétantes, le SUV est entré dans le cœur des Français. Réservé au début aux départements les plus aisés et les plus urbains, comme Paris et les Hauts-de-Seine, il s’est finalement répandu partout dans l’Hexagone. En 10 ans, les ventes de la carrosserie ont été multipliées par 7. En 2019, elles représentaient 38 % des ventes de véhicules neufs, contre moins de 6 % en 2009. Les SUV dominent aujourd’hui sans conteste le marché des véhicules neufs en Europe avec plus de 5,9 millions d’unités vendues en 2019, loin devant le segment des citadines qui ne compte que 4 millions de véhicules cette année-là.
Un gouffre économique pour les ménages
Outre le domaine écologique, le portefeuille des ménages est aussi une victime collatérale des SUV. Cette carrosserie coûte en moyenne 30 % plus cher à l’achat qu’une berline et consomme 20 % de carburant de plus. À terme, selon WWF, l’arrivée des SUV sur le marché d’occasion pourrait faire grimper de 13 % le budget voiture des ménages modestes.
L’arrivée de véhicule SUV hybride, et même électrique pourrait sembler être la solution à tous ces maux. C’est sans compter sur l’étude WWF qui met clairement cette option de côté. « D’ici 2030, en électrifiant son parc automobile sans réduire les ventes de SUV, la France ne tiendrait pas les engagements climatiques qu’elle s’est fixés » lit-on dans le communiqué de l’association.
Le gouvernement « face à un choix historique »
WWF ne conclut pas ces études sans proposer de solutions. L’association demande au gouvernement d’inciter les constructeurs à privilégier des véhicules plus légers et moins dommageables au climat. La question de la fiscalité est aussi soulevée. Selon WWF, elle doit être « renforcée et restructurée autour du critère complémentaire du poids pour intégrer l’ensemble des externalités environnementales de la voiture ». L’objectif est de ne pas reproduire cette décennie entièrement dédiée aux SUV. « Le gouvernement est face à un choix historique : continuer comme avant ou ré-orienter sans attendre d’industrie automobile vers la production et la vente de véhicules plus légers, plus respectueux de l’environnement et aussi plus favorables au pouvoir d’achat », conclut Isabelle Autissier, la présidente du WWF France.