Cuisine, jardinage, danse, lecture, écriture, dessin, bricolage, couture … On le voit sur les réseaux sociaux, le confinement en inspire plus d’un. L’isolement social que nous subissons serait-il vecteur de créativité ? Voilà une idée plaisante que la science, mais aussi l’histoire, tendent à confirmer.
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Certains s’empressent de faire quelque chose de leurs dix doigts, d’autres se sentent beaucoup plus productifs dans leur travail. Des études le prouvent, on travaille plus, parfois mieux, depuis que l’on est confiné. Libérés des interruptions constantes de notre entourage, nous parvenons enfin à nous concentrer. Résultat, de belles idées affleurent à la surface de notre esprit. L’isolement aurait-il finalement du bon ? Certains grands personnages de l’Histoire en sont convaincus.
Isaac Newton, Abraham Lincoln, Bill Gates : champions de l’isolement productif
1665, en Angleterre, l’épidémie de peste bubonique contraint la population britannique au confinement. Le jeune Isaac Newton alors étudiant du Trinity College de Cambridge, se réfugie dans le domaine de ses parents au nord de Londres. C’est pendant cette longue période d’isolement, qui dura près d’un an, que le physicien construisit les bases de ses plus grandes découvertes. Parmi celles-ci, la fameuse loi de la gravitation universelle qui façonnera la pensée scientifique plusieurs siècles après lui.
Années 1860, au nord de Washington D.C, une petite maison accueille chaque été un invité de marque. Elle a été choisie par le Président Abraham Lincoln pour lui tenir lieu de forteresse de solitude. Il y vient régulièrement, pour s’échapper de l’activité étourdissante de la Maison Blanche. Plusieurs recherches démontrent que le silence et le calme du cottage ont joué un rôle majeur dans l’histoire de l’Amérique. C’est dans cette petite maison que Lincoln aurait mené les réflexions qui permirent en 1963 la Proclamation de l’Émancipation, abolissant l’esclavage aux États-Unis.
Années 2000, Bill Gates, fondateur de Microsoft, est l’homme le plus riche du monde. Interrogé par tous les journaux de la planète, il partage sa recette du succès. Parmi les ingrédients : l’isolement. Chaque année, pendant deux semaines, le milliardaire se retire dans une cabane dans les bois, secrète et loin de tout. Pendant ces « Think Weeks », il prend le temps de penser et de lire des articles écrits par les employés de Microsoft présentant de nouvelles idées innovantes. La légende dit que le travail effectué lors de ces retraites aurait mené au lancement, en 1995, d’Internet Explorer.
Créativité et connaissance de soi : les valeurs cachées de la solitude
Ces exemples, mais aussi la science, suggèrent que la solitude épisodique présente des avantages pour la créativité et le leadership. De fait, quelles soient subies ou souhaitées, les expériences d’isolement décrites précédemment ont en commun l’absence d’individu réclamant sans cesse de l’attention. Dès lors, ces périodes de calme autorisent la réflexion, l’observation mais surtout la concentration, indispensables au processus créatif.
Défenseurs du brainstorming et de l’esprit d’équipe, on en vient à oublier que la créativité n’émerge pas uniquement du collectif. L’historien et homme politique britannique Edward Gibbon (1737-1794), estimait d’ailleurs que la solitude était « l’école des génies ». La preuve en est que la majorité des poètes, écrivains et compositeurs ont coutume de passer de longues périodes seuls. Pour autant, cela ne les empêchent pas de vivre des vies remarquables. S’isoler serait donc au moins aussi important que la sociabilité pour entretenir la créativité, la productivité et le bonheur.
Et pour être seul, le confinement n’est pas l’unique solution. Bien plus qu’une situation physique, la solitude est un état subjectif dans lequel l’esprit se trouve libéré des apports d’autres esprits. Il apparaît donc possible de l’apprécier au milieu d’une foule, du moment que l’attention se concentre seulement sur ses propres pensées. L’absence de solitude, lorsque l’esprit est saturé de stimuli extérieurs, s’accompagne d’effets négatifs. Anxiété, incapacité à résoudre des problèmes complexes, difficulté à réguler ses émotions ou à construire des relations solides, sont les résultats de ce manque. Par conséquent, préserver des moments en tête à tête avec son esprit, participe au bien-être des individus. Il permet notamment de se recentrer sur soi et d’apprendre à mieux se connaître. Un travail d’introspection pouvant aboutir à une plus grande proximité avec son entourage.
Aujourd’hui seul au monde ? Pas tout à fait
Toutefois, s’il semblait simple pour Newton ou pour Lincoln de s’échapper du monde en s’éloignant physiquement de leurs contemporains, l’exercice s’avère plus complexe à notre époque. Aujourd’hui, le monde est au bout de nos doigts et ne nous quitte jamais. Réseaux sociaux, internet, télévision, radio, téléphone … notre quotidien regorge de stimuli prêts à nous arracher quelques secondes de notre attention.
Afin de se libérer de cette emprise, Cal Newport dans son livre Digital Minimalism, suggère à ses lecteurs de réduire leur usage des smartphones et des réseaux sociaux. Un processus digne d’une cure de désintoxication qu’il propose de mener en quatre étapes : passer du temps seul, ne plus cliquer sur « like », avoir des loisirs, rejoindre le « mouvement de résistance de l’attention ». Alors pourquoi ne pas profiter du confinement pour se désintoxiquer de nos outils numériques et faire une cure de solitude ? Peut-être un chef d’œuvre de créativité nous attend-il de l’autre côté du tunnel.
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