S’adosser à un grand groupe pour se déployer. Telle a été la stratégie gagnante d’Exotec qui propose depuis 2016 des robots pour les préparations de commandes de Cdiscount. Du côté du grand groupe, c’est l’occasion de bénéficier de l’agilité et de l’audace d’une startup en valorisant la co-création. Cette ouverture mutuelle à l’open-innovation leur a d’ailleurs valu le dernier Prix David avec Goliath.
À 9 mois à peine d’existence, Exotec frappait déjà à la porte des grands groupes. N’y voyons pas là un simple opportunisme, mais plutôt LA stratégie à adopter lorsqu’on souhaite développer rapidement des dispositifs complexes. Pour cette jeune pousse de la tech, s’adosser à un grand groupe est l’occasion d’assurer les premiers prototypages sans brûler toute sa trésorerie. C’est aussi l’opportunité de valider le produit par rapport aux besoins réels d’un marché. Enfin, former un tandem c’est fusionner l’agilité d’une startup avec le pragmatisme d’un grand du secteur. Ce grand du secteur justement, ce sera Cdiscount qui précise par la voix de son directeur innovation et performance supply chain, James Rebours, que « l’objectif d’une telle association est d’ériger le meilleur terrain de jeu possible pour créer de la co-innovation ».
Coup de cœur industriel entre Exotec et Cdiscount
Au printemps 2016, le rendez-vous est donc pris avec Cdiscount. Le courant passe immédiatement entre la startup lilloise et le site de vente en ligne. En effet, l’e-commerçant ne tarde pas à être convaincu par leur solution robotisée de préparation de commandes. Ce qui a fait la différence ? « Exotec est venu dans nos locaux à Bordeaux avec deux grandes idées. La première est un système de robots qui se déplacent en 2D. L’autre, alors inexistante sur le marché à l’époque, misait sur le déplacement en 3D, développe James Rebours. Ce n’était pas la première fois qu’on nous proposait ce genre de dispositifs. Mais c’était la première fois que c’était aussi industrialisable et scalable ». Pas étonnant quand on découvre ces machines de la taille d’une valise fabriqués en France.
Une production made in France qui fait figure de prérequis pour les deux entreprises. Car, derrière une fabrication de proximité à l’heure du tout mondialisé, Exotec a l’assurance de développer un système très configurable et adapté aux besoins de chaque client. De quoi faire du cas par cas, tout en étant une clé de la réindustrialisation hexagonale.
Plus de performance et moins de pénibilité
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les résultats sont là. Depuis que les deux entreprises sont devenues de véritables partenaires, le traitement des stocks est passé chez Cdiscount de 80 lignes par heure à 400. Quant à la hauteur des rayonnages, elle a été rehaussée de 2 à 10 mètres. « Notre densité de stockage a donc été multipliée par cinq », se félicite James Rebours. Sur la fin du premier semestre 2019, le hangar de l’entreprise situé en périphérie de Bordeaux comptera 8 robots pour 2 000 bacs. Celui de Réau en banlieue parisienne accueillera 50 machines pour 60 000 bacs.
Les avantages ne sont pas uniquement du côté de la rentabilité de place. Ces robots ont été déployés pour changer le quotidien des manutentionnaires. Alors oui, « toutes les sirènes s’affolent quand on parle de robots ! déplore Romain Moulin, le co-fondateur d’Exotec. Or nous embarquons les opérateurs avec nous. Tous nos clients ne sont pas dans une logique de diminution de la main d’œuvre, mais bien de la pénibilité du travail. » Même son de cloche chez Cdiscount : « L’acceptabilité sociale était une priorité pour nous. Avec Exotec, la promesse est de réduire le parcours quotidien des équipes qui peuvent faire jusqu’à 15 km chaque jour dans les entrepôts », loue James Rebours. Ce dernier voit encore plus loin : « Sur un plan plus global, cela nous a aussi permis de prendre conscience d’un terrain propice à l’open-innovation et d’y acquérir une vraie légitimité. »
L’open-innovation à toutes les strates de la chaîne
En effet, cette stratégie d’aller vers l’open-innovation a fait bien des petits chez Cdiscount. Que ce soit au niveau de sa supply chain ou de son lab’ marketing, mais aussi avec la création en juin 2018 de The Warehouse, un entrepôt destiné aux startups pour créer la supply chain du futur. Aujourd’hui, à l’heure où l’accélérateur vient de recruter sa 2epromotion, les startups de 2018 affichent un taux de succès de 60%.
Le Prix David avec Goliath 2018, c’est eux !
Point d’orgue de leur association et récompense de deux années de collaboration, le Prix David avec Goliath leur a été attribués fin 2018. Cette distinction créée par le fonds de dotation RAISE et le cabinet de conseil Bain & Company a gravé dans le marbre leur relation startup/grand groupe. Mieux, selon James Rebours, « cela a permis de faire de notre alliance un discours vraiment très certifiant. C’est une vraie légitimité, une sorte de tampon, de label et pas un simple discours marketing. C’est aussi l’opportunité de découvrir et de s’inscrire dans un écosystème plus large. »
Quant à Exotec, il reconnaît le surplus de notoriété que cela leur apporte, tant auprès de futurs clients (des grands groupes dans leur cas) qu’auprès de marques employeurs. Dans ce cadre, la startup a également remporté un prêt RAISE de 100 000 euros à taux 0 sans garantie, un accompagnement de conseil en stratégie de 6 mois par Bain & Company et une intégration à la communauté RAISESHERPAS.
Une association pérenne
Mais au-delà de la co-création, il s’agit de faire pleinement vivre le projet dans le temps. Dans cette optique, depuis que le dispositif est déployé dans les entrepôts de Cdiscount, Exotec est en constante discussion avec ce dernier, notamment sur les ‘paint points’ (comprendre un point qui peut nuire à l’expérience d’usage ou d’achat du client), afin de toujours optimiser leur solution.
Et ce, autour de grandes problématiques que précise Cdiscount : « la réduction de la pénibilité au travail, l’amélioration de l’expérience client, dans le cas d’Exotec, il s’agit de la diminution du ‘lead time’, la valorisation d’une démarche éco-responsable, que ce soit sur le plan écologique comme sociétal et l’optimisation de la performance ».
Et James Rebours en est certain : tout est question de volonté. Il l’affirme lui-même : “where there’s a will, there’s a way.” Autrement dit, quand on veut, on peut. CQFD.
Une super entreprise de la tech made in France ça fait plaisir ! Il me semble qu'Exotec est passé par l'incubateur Paristech Entrepreneurs
Par Loki, le 23 avril 2019