Reposant sur le Big Data, le recrutement prédictif intéresse de plus en plus les services RH des entreprises. Une technique qui permettrait à l’employeur de dénicher le candidat le plus performant pour un poste grâce à un algorithme, comme nous l’explique Mickaël Cabrol, CEO d’EASYRECRUE qui vient de lever 8M€.
W : En quelques mots, comment définissez-vous le recrutement prédictif ?
Mickaël Cabrol : C’est presque un pléonasme puisque le recrutement consiste déjà à anticiper les hard skills et soft skills du candidat pour occuper un poste dans une organisation donnée. Aujourd’hui, l’explosion des données et l’utilisation des nouvelles technologies permettent de s’intéresser davantage à la notion d’anticipation et de “prédiction” dans le recrutement. Il s’agit de mieux cibler un candidat pour un poste spécifique.
W : Comment cela fonctionne-t-il ?
M.C : Nous menons des travaux de recherche en partenariat avec Telecom Paris Tech et le LIMSI, qui co-encadrent une thèse sur l’analyse automatique des vidéos dont le titre exact est le suivant « Analyse Automatique des Signaux Sociaux Multimodaux lors d’Entretiens Vidéo Différés pour le Recrutement ».
La thèse se base sur l’étude et les corrélations des éléments suivants :
– Théories et modèles issus de la psychologie.
– Etude perceptive des vidéos ; définition d’un schéma et guide d’annotation des comportements sociaux et multimodaux observés.
– Spécification et adaptation d’outils de traitement informatique et de fusion de données vidéo, audio et linguistique pour extraire les caractéristiques pertinentes.
– Analyser et interpréter les relations entre les caractéristiques extraites automatiquement et les annotations subjectives effectuées par les recruteurs.
W : Est-ce vraiment efficace ?
M.C : Nos travaux sont encore au stade de la recherche donc nous pourrons vous en dire plus prochainement. En revanche, les éditeurs de tests et assessment centers sont assez avancés dans ce domaine et obtiennent des résultats probants. Il faut savoir que le recrutement prédictif se base sur le réel (comment et pourquoi les recruteurs évaluent de tel façon le candidat, quels sont les dénominateurs communs, quels sont les candidats qui réussissent…). Par exemple, nous avons remarqué que sur l’évaluation d’un même entretien vidéo, le consensus est meilleur avec l’évaluation automatique de la « machine » qu’entre les recruteurs eux-mêmes.
W : Pourquoi avoir développé ça ?
M.C : L’entretien vidéo est un exercice d’un genre nouveau pour candidats et recruteurs. Ce constat soulève plusieurs enjeux en termes de recherche : comment aider le candidat à s’entraîner à réussir ce type d’entretien d’embauche ? Comment aider le recruteur à identifier non seulement les candidats qu’il va sélectionner pour les entretiens en face à face, mais aussi les critères sur lesquels il se base implicitement pour réaliser cette pré-sélection ?
W : Quel avantage y-a-t’il à passer par le recrutement prédictif pour un employeur / pour un demandeur d’emploi ?
M.C : L’objectif de cette thèse est de développer une méthode d’apprentissage automatique pour :
– produire des recommandations de pré-sélection pour les recruteurs ;
– produire un bilan et des conseils d’entraînement pour les candidats.
W : Est-ce l’avenir du recrutement selon vous ?
M.C : Je pense que c’est une des thématiques incontournables du recrutement pour les prochaines années. Nous avons de plus en plus de données à disposition sur les collaborateurs et candidats grâce au digital et aux avancées technologiques pour les exploiter et en produire des recommandations. Pourquoi s’en priverait-on pour recruter les meilleurs collaborateurs !