La victoire d’un homme d’affaires devrait être une bonne nouvelle pour les entrepreneurs du monde entier. Mais, c’est loin d’être le cas.
Waouhh, Awesome, terrific… Qui a dit que seuls les Américains étaient démonstratifs. Nous aussi les entrepreneurs aurions pu nous réjouir qu’un confrère arrive à la tête du plus puissant des pays. Au lieu de ça, notre enthousiasme est douché. Il est substitué par une vague d’angoisse mondiale dans les médias et aussi parmi les nôtres. Bref la poisse !!!.
Toutes les précautions oratoires et toutes les initiales et les points pour ne pas lire et dire le F word (FUUUUCCCKKKK) n’y suffiront pas pour combler la frustration qui est la mienne de ne pouvoir célébrer l’élection d’un entrepreneur à la tête du plus incroyable des pays, les USA.
« La victoire de la colère »
Alors, pour prouver cet état de fait faisons un tour de la presse mondiale telle que l’a compilée ce matin l’Agence France Presse.
Certains en font une « tragédie », une « catastrophe », d’autres « la victoire de la colère » et « la revanche » des petites gens, mais la presse mondiale s’accordait mercredi à voir avant tout dans la victoire de Donald Trump le triomphe du populisme et l’arrivée d’une présidence imprévisible.
« La victoire de la colère », titrait le quotidien français Le Monde, voyant dans l’arrivée au pouvoir de Trump une victoire qui « confortera les mouvements et leaders populistes du monde entier ». Et dans sa promesse de « rendre sa grandeur à l’Amérique » un signal « de repli et d’isolationnisme ».
« Cette nouvelle réalité ne se dissoudra pas »
« Trumpocalypse », titrait Libération. « Ne nous y trompons pas : la première puissance mondiale est désormais aux mains de l’extrême droite. La moitié des Américains ont voté, en toute conscience, pour un candidat raciste, menteur, sexiste, vulgaire, haineux (…) Cette élection est un avertissement supplémentaire pour ceux qui pensent que Marine Le Pen ne peut parvenir au pouvoir en France en 2017 ».
Le Figaro voit dans « la colère américaine » qui porte Trump au pouvoir « la grande cousine des frondes européennes. Cette nouvelle réalité ne se dissoudra pas comme un ciel empoudré au soir d’un combat. Ni sur une rive de l’Atlantique ni sur l’autre. »
En Allemagne, le Süddeutsche Zeitung déplore « la pire catastrophe possible (…) L’inimaginable est devenu réalité ».
« Le reste du monde doit digérer ce qui s’est passé cette nuit »
À Londres, le Guardian (gauche) renchérit: « Le peuple américain a plongé dans l’abîme. Le prochain président est un homme sectaire et instable, un prédateur sexuel et un menteur invétéré. Il est capable de tout ».
Le tabloïde de droite Daily Mail salue, lui, « la revanche » des petites gens, et « une humiliation pour Hillary, pour les sondeurs et pour les élites des affaires et du showbusiness ».
En Italie, la Stampa est moins pessimiste. Sous le titre « Trump, un ouragan de rage et de mécontentement », il estime que « la victoire de Trump confirme la vitalité de la démocratie américaine, capable de se transformer continuellement », même si elle provoque « un déluge d’incertitudes liées à l’imprévisibilité du vainqueur ». En attendant, ajoute-t-il, « le reste du monde doit digérer ce qui s’est passé cette nuit: le peuple de la révolte frappe à nos portes ».
Espérer que M. Trump soit un meilleur président que nous ne le craignons
En Australie, l’éditorialiste économique des journaux du groupe Fairfax Media est catastrophé, prédisant une « instabilité financière extraordinaire » et le risque de voir Trump « déstabiliser la première économie mondiale en poussant sa dette à plus de 100% de son PIB ».
Aux États-Unis, les grands journaux soulignent la défaite des élites politico-médiatiques. « Le président Donald Trump. Trois mots qui étaient impensables pour des dizaines de millions d’Américains », écrit le New York Times, qui reconnaît « un coup humiliant pour les médias, les sondeurs et l’élite démocrate ».
Le Washington Post y lit la victoire « des électeurs ruraux et des zones industrielles sinistrées qui estiment que l’élite politique les a abandonnés », avant d’espérer « que M. Trump sera un meilleur président que nous ne le craignons », et que la force des institutions démocratiques l’empêchera de « déporter des millions de gens, déchirer des accords commerciaux, limiter la Liberté de la presse (…) et saboter les efforts mondiaux pour lutter contre le changement climatique international », comme annoncé au cours de sa campagne.
Une telle outrance que presque aucun entrepreneurs n’ont voulu le soutenir
Enfin le magazine New Yorker, sous le titre « Une tragédie américaine », souligne que la victoire de Trump « alors que son racisme et sa misogynie étaient bien connus suggère que ces sentiments sont largement partagés ».
Mais la presse, ça n’est pas tout me direz-vous, les milieux entrepreneuriaux doivent se réjouir…. et bien non, eux non plus. Les Newsletters des Echos du 9 novembre titrent : « Le secteur de la « tech » tremble après l’élection de Donald Trump à la Maison Blanche » et « La Silicon Valley frémit face à l’élection de Trump ». En effet, le programme et les déclarations du futur président ont été totalement à l’opposé de ce qui a fait le succès des entreprises high-tech, et notamment en ce qui concerne le patriotisme économique et l’immigration.
The Donald aura déployé une telle outrance durant toute la campagne que même ses coreligionnaires patrons et entrepreneurs n’ont pas souhaité le soutenir ni ne se réjouissent de son accession à la fonction suprême américaine. C’est dommageable à double titre, car les entrepreneurs sont attendus en politique, c’était en tout cas les principaux enseignements d’un sondage que Coriolink et Widoobiz ont fait réaliser par Odoxa. 45% des Français souhaitent entendre les entrepreneurs durant la campagne présidentielle de 2017. Qui sait, en France aurons-nous plus de chance que nos amis américains.
Jacky Isabello
Co-fondateur de Coriolink
Dernier ouvrage paru : « En finir avec la dictature du salariat »
9 novembre 2016