À la tête d’une fortune estimée entre 2 et 3 milliards d’euros, Gérard Mulliez a créé l’un des plus grands empires de France. Retour sur un entrepreneur discret, mais hors du commun.
« On a toujours préconisé que le salaire maximum soit de 20 smic ». Quand le fondateur de l’empire Mulliez sort du silence pour parler à L’Obs, ce n’est pas pour faire de la langue de bois. Des propos plutôt étonnants venant d’un entrepreneur milliardaire. Rappelons-le, le groupe Auchan réalise 53,45 milliards d’euros pour l’année 2014 et emploie plusieurs centaines de milliers de personnes sur les cinq continents. Mais, voilà : Gérard Mulliez n’est pas un entrepreneur comme les autres. La preuve en trois citations.
« Tout est dans tout, dans le même pourcentage et dans toutes les entreprises »
C’est peut-être l’idée la plus géniale de la famille Mulliez. Grâce à une formule que l’on qualifie de « 8-6 » copiée dans tous les statuts des entreprises détenues par les associés familiaux, seuls les descendants du couple Louis Mulliez et Marguerite Lestienne (grands-parents de Gérard Mulliez) peuvent détenir des titres du pacte d’actionnaires. Impossible dans ces conditions de vendre des parts en dehors de la famille.
Pas besoin de banquiers et encore moins de bourse pour augmenter son capital. Ceux qui appartiennent à la famille peuvent ensuite acheter/vendre selon les règles d’un marché interne. Alors, certes, le fonctionnement de l’empire est clanique, mais Gérard Mulliez a obtenu ce qu’il voulait : l’indépendance.
« Je ne suis pas radin. Je suis économe »
Gérard Mulliez est l’archétype de l’entrepreneur nordiste : paysan, travailleur acharné, discret et économe. « Je voyage toujours en seconde classe », admet-il non sans fierté. C’est ce qui lui permet de rester en contact avec ses clients : des gens pour qui « un sous reste un sous ». Une philosophie qu’il veut voir partagée par ses collaborateurs.
C’est aussi la raison pour laquelle il ne souhaite pas voir ses dirigeants rémunérés au-dessus de 20 Smics ? Au-delà, « cette personne qui a beaucoup d’argent finit par ne pas comprendre celle qui n’en a pas ». Enfin, il remarque qu’un salaire élevé est le meilleur moyen de limiter la hausse des salaires « du personnel de base ».
« Réussir ensemble ou se casser la figure ensemble »
Même à 84 ans, Gérard Mulliez reste au final ce qu’il a toujours été : un patron de startup. A ses yeux, tout le monde doit donner le maximum : patron, cadre, stagiaire. Une entreprise doit rester une aventure humaine.
Une philosophie qui a permis à la famille Mulliez de mettre en avant tous les profils entreprenants. Résultat, le groupe a lancé des concepts toujours plus innovants (Leroy Merlin, Kiloutou, Décathlon, etc.). Sans jamais avoir peur d’aller à l’international.
Un modèle qui pourrait très bien être reproduit en France, où l’entrepreneuriat familial est si important.