Définie comme une stratégie permettant à des entreprises considérées comme concurrentes de partager leurs ressources, humaines, financières et parfois marketing, la coopétition n’est pas un concept très récent mais il reste cependant des plus discrets.
C’est dans les années 60 que l’on trouve les premières traces bien nettes de ces « ententes », lorsque les quelques pays qui maîtrisent à l’époque l’énergie nucléaire, et on se rappelle qu’ils étaient connus pour être beaucoup plus que des concurrents puisqu’on utilisait bien volontiers le mot d’ennemis, réussissent cependant à s’entendre en coulisses pour tout mettre en œuvre afin d’éviter que d’autres rejoignent leur cercle restreint. Cette entente au plan étatique trouvera d’ailleurs très rapidement un relai au niveau des entreprises, lorsque américains et français créeront Framatome (devenu depuis Areva) afin de construire les centrales nucléaires françaises, mais aussi permettre à ces mêmes américains de partir à la conquête d’autres pays qui leur étaient politiquement très difficiles d’accès, sous le couvert de notre bannière tricolore nationale.
S’entendre avec un de ses concurrents, dans les limites autorisées par la loi, peut de plus permettre de faire un peu de ménage sur un marché quelque peu encombré. Plus précisément la tactique consiste à aider un de vos concurrent, considéré à un instant donné comme peu dangereux, afin qu’à termes celui-ci fasse la nique à vos autres concurrents qui eux, auraient pu finir par vous faire rapidement ombrage. Vous ne voyez pas concrètement comment cela peut être possible ? Jetez donc un coup d’oeil du côté du géant Google qui a ces dernières années largement financé le collectif Mozilla, pourtant développeur du navigateur Firefox, considéré comme en concurrence directe avec leur navigateur Chrome … Le moyen le plus efficace qu’ils semblent avoir trouvé afin de freiner Internet Explorer et autre Safari…
La coopétition prend également la forme de mutualisation de moyens, souvent en matière de recherche, afin d’aller plus vite dans le développement de nouveaux produits dont chaque acteur pourra tirer profit par la suite. Cela se produit de temps en temps dans l’industrie pharmaceutique pourtant considérée comme extrêmement compétitive. On trouvera également une forme relativement efficace de coopétition lorsque tous les acteurs d’un secteur donné font front de façon coordonnée pour éviter qu’un nouvel entrant, souvent un mastodonte aux moyens financiers importants, puisse pénétrer ce même secteur. Les cafetiers qui s’organisent en associations pour empêcher un Starbuck’s de s’implanter dans leur ville, ou les magasins de proximité qui font la même chose pour éviter qu’une grande surface empiète sur leur platebandes, en sont les exemples les plus parlants.
Forme particulière de co-branding, la coopétiton est une arme à laquelle on ne pense pas toujours mais qui peut s’avérer très redoutable…
Thierry Guichard