Davantage que Peugeot, la fermeture de l’usine PSA d’Aulnay sous bois touche en plein cœur la marque Citroën. Retour sur l’épopée d’un ancien fleuron industriel qui n’en est pas à sa première crise.
Le soleil ne risque pas de revenir de sitôt à Aulnay sous bois. Et le pire, c’est que la fermeture du site ne suffira peut être même pas à PSA pour redresser la barre. Ah, il est bien terminé le temps où le groupe automobile affichait un bénéfice semestriel de 806 millions d’euros, grâce entre autre au succès de la nouvelle génération de DS. C’était il y a un an à peine. Autant dire, une éternité.
Il faut dire qu’entre temps, la crise est passée par là. Entre les banques, les dettes souveraines, l’euro, rien n’a été épargné à l’Europe. Problème, le continent est le principal marché à l’export de PSA. Or, avec un recul de 7% du marché automobile européen, les ventes mondiales ont rétréci de 13% sur le premier semestre. Bien plus que Renault qui a su davantage diversifier ses marchés à l’étranger, en prenant pied sur les marchés émergents.
Qui plus est, PSA produit à des coûts encore trop élevés par rapport à ses concurrents. Rançon d’une politique qui a voulu garder une grande partie de sa production dans l’hexagone. Mais ce n’est pas tout. PSA a également pris du retard dans la méthode de production. Résultat, concevoir ou produire coûte entre 10 et 20 %. Sans parler de sa stratégie de montée de gamme, initié par le précédent Président du conseil d’administration de PSA, Christian Streiff. Problème de taille, les Berlines Allemandes sont les reines de la catégorie. Dur, dur…
Petit retour en arrière
En 1917, la 1ère guerre mondiale touche à sa fin et André Citroën, premier producteur Français d’obus de 75 pense déjà à reconvertir son usine du Quai de Javel. Il déclare d’ailleurs à l’époque : « après avoir contribué à la victoire des armes Françaises, Citroën contribuera à la grandeur économique de la France ». Vœu qui va très vite devenir réalité.
Spécialiste du travail rationalisé, il annonce la sortie de la Citroën type A, moitié moins chère qu’une voiture d’avant-guerre. Le succès est immédiat. Tout au long de sa vie d’entrepreneur, le chef d’entreprise s’inspire des méthodes Américaines : sur les procédés techniques, sur la vente, la réclame. Il sera d’ailleurs le premier à illuminer la tour Eiffel du nom de sa marque. L’entrepreneur est au fait de sa gloire.
Mais, comme le dit Bill Gates : » le succès est un mauvais professeur. Il pousse les gens intelligents à croire qu’ils sont infaillibles ». Citation qui, malheureusement, colle parfaitement à André Citroën. C’est un patron absolu, et personne ne remet en cause sa gestion financière hasardeuse. Résultat, il est lâché par ses investisseurs peu de temps seulement après avoir lancé le fameux modèle de la traction avant. Son plus grand créancier, Michelin, récupère tout : la marque, les usines et les brevets. Citroën n’appartient plus à Citroën.
Ce qui nous amène à cette situation paradoxale : la chute du génial entrepreneur ne vient pas de sa stratégie mais de sa gestion amatrice. Et aujourd’hui, le groupe gère sérieusement mais a manqué de vision à long terme. Ce qu’elle paye cash. Il ne reste plus qu’ à espérer qu’elle retienne définitivement la leçon.
Tancrède Blondé