« Ceux devant qui se sont dressés, sous l’éclatant ciel bleu de juin, ces deux effrayants chefs-d’œuvre de la guerre civile, ne les oublieront jamais » : Victor Hugo, dans un chapitre des Misérables, évoque ainsi les deux plus formidables barricades de l’insurrection parisienne de juin 1848, dont il fut un témoin et même un acteur. À la tête de l’une un « gamin tragique », ouvrier mécanicien, derrière l’autre un géant truculent, ex-officier de marine. C’est, à partir de ce (tout petit) pan de littérature qu’Olivier Rolin trouve l’inspiration de son nouveau roman, Jusqu’à ce que mort s’ensuive publié aux éditions Gallimard.
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Emmanuel Barthélemy, l’ouvrier, et Frédéric Cournet, le marin, ne sont pas des personnages de fiction, ils ont réellement existé. Olivier Rolin, en romancier historien, reconstitue ces destins oubliés, ces destins qui, pour Hugo, ne valaient que quelques lignes. Des Misérables, on a retenu Gavroche et Cosette, Valjean et Javert, le reste est, admettons-le, plus nébuleux. Et bien c’est précisément de cette nébuleuse dont y il est question. L’exercice est passionnant, on alterne entre enquête policière, biographie, intrigues à tiroirs…et on se dit que, quitte à choisir deux illustres inconnus (presque) au hasard, Olivier Rolin est plutôt très bien tombé.
Ce sont des hommes de leur siècle, des vies de tumultes, à l’image du temps. Des destins oubliés qui, eux aussi, on écrit une part de notre histoire. Les barricades, le bagne, des évasions, un coup d’État, un duel à mort, des meurtres, Karl Marx et Napoléon III. Tout cela condensé en deux existences anonymes. Excusez du peu.
Jusqu’à ce que mort s’ensuive est un texte finalement assez inclassable, une sorte d’ovni littéraire, mais un ovni que l’on se surprend à lire d’une traite, sans effort, comme si de rien n’était.