Raconter la vie d’un personnage réel et connu qui plus est, c’est toujours choisir un angle. A la première personne, pour créer une proximité, à la troisième personne pour un regard plus neutre et extérieur… Maylis Besserie opte pour une approche moins convenue et (re)fait vivre Francis Bacon à travers le regard de sa nourrice. Résultat ? Distance et connivence, proximité et jugement… bref le meilleur de deux mondes.
Reposons le décor :
Personnage méconnu et pourtant central de la vie de Francis Bacon, la bien nommée Jessie Lightfoot fut celle qui le protégea toujours, de son tyran de père dans son enfance comme de ses pires excès à Londres. La tendresse de cette Nanny venue des Cornouailles contraste avec les violences que subit très tôt Bacon, et apporte une couleur inédite à la palette sulfureuse du peintre.
C’est donc un voyage dans le temps, au plus près d’un peintre complexe et tourmenté. Tout démarre dans cette Irlande violente du début du siècle, avec un vase clos familial étouffant et violent, une enfance qui marquera toute sa vie Francis Bacon. Au carcan de l’Irlande répond la démesure de Londres et les excès en tout genre. Londres, c’est aussi le temps de la naissance d’une peinture angoissée et monstrueuse.
C’est cette histoire que raconte Jessie Lightfoot, avec ses mots simples et ce regard toujours affectueux. A ce récit s’ajoute des réflexions de Bacon sur sa peinture, le doute de l’artiste face à la toile. Au final, cette biographie (simplifions volontairement) de Bacon est un tour de force parfaitement maitrisé, un autre regard sur un des peintres les plus torturés des dernières décennies.
La nourrice de Francis Bacon est publié aux éditions Gallimard.