Encore un livre sur un auteur à la dérive ? Encore une plongée, forcément nombriliste sur les errances d’une gloire passée ? Encore une ode au néant ? Oui. Mais avec Ces gens-là publié aux éditions Gallimard, Chico Buarque arrive à redonner du souffle à un format que l’on pensait, à tort, épuisé.
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Une fois n’est pas coutume, commençons par la forme. On s’était habitué et un peu lassé des longs monologues intérieurs ou des fausses mémoires. Un écrivain connait le succès, puis lentement perd son inspiration et raconte plus ou moins maladroitement son prochain livre à venir qui n’arrivera jamais. Avouez que l’on est en plein déjà vu. Oui mais voilà, Chico Buarque réussit le petit tour de force de faire à peu près la même chose, mais en bien. Tout est une question d’angle d’attaque, de point de vue.
Dans Ces gens là, on alterne entre l’épistolaire, le journal, le courrier procédurale. On suit, avec une certaine forme de désordre, les pérégrination tragi-comique de ce Manuel Duarte, écrivain raté de son état sans linéarité, comme à distance.
L’histoire en quelques mots : Manuel Duarte est un écrivain sexagénaire en panne d’inspiration dont la vie affective et matérielle part à vau-l’eau. Menacé d’être expulsé de son appartement dont il ne peut payer le loyer, il déambule dans le Leblon, quartier huppé de Rio de Janeiro, tandis qu’autour de lui la ville périclite. Bolsonaro vient d’arriver au pouvoir, porté par une élite violente et égoïste. Duarte pose sur ce monde grotesque, à la fois réel et fantasmé, un regard distancié, qui donne une saveur terriblement comique à son récit.
Pari tenu pour Chico Buarque qui, avec Ces gens là, propose un livre aussi hybride que réussi.