Pénurie de médecins et plus largement de personnel soignant, mal-être et démissions en masse, temps d’attente prolongés, lassitude post covid… On assiste depuis plusieurs années, et plus encore ces derniers mois, à une crise des urgences et plus largement, à une crise hospitalière profonde qui se manifeste par une difficulté à assurer la permanence des soins (les soins non programmés le soir, la nuit, les week-ends et les jours fériés). Ce constat n’épargne pas la radiologie. Dans ce contexte, quelle est la solution pour sortir de l’impasse de la crise des urgences ?
Vous aimerez aussi
Dès le début de l’été dernier, la moitié des établissements hospitaliers français, publics et privés, ont été obligés de réduire ou de fermer leurs services d’urgences. Cette situation complexe qui entraîne une modification de la prise en charge des patients est à mettre en parallèle avec la hausse continue du recours aux urgences par la population : le nombre de passage aux urgences a en effet doublé en 20 ans1, le secteur public assurant la prise en charge de plus de 80% de ces patients.
Avec près de 40% des patients reçus aux urgences qui nécessitent un examen radiologique, les services d’imagerie sont eux aussi mis sous pression. Il faut assumer, malgré la pénurie de radiologues et de manipulateurs radio, l’augmentation phénoménale de cette activité et participer efficacement à la fluidité du système. L’objectif ? Un diagnostic radiologique de qualité dans des délais les plus courts possible, 24h/24h !
Citons le cas extrême de l’AVC aigu, où la moindre minute compte -Time is Brain- : le scanner ou l’IRM sont ici les points charnières d’orientation du traitement pour préserver le patient d’un handicap définitif.
Faire, le bon diagnostic, dans les meilleurs délais, jour et nuit, c’est le challenge que doit relever la radiologie française.
Dans le contexte global de pénurie des médecins, comment motiver les radiologues libéraux à participer à la permanence des soins des hôpitaux publics ?
Régulièrement pointée du doigt et accusée de ne pas participer à la permanence des soins de l’hôpital public, la médecine libérale est souvent considérée comme une des causes aggravantes de la crise des urgences actuelle. La radiologie libérale n’y fait pas exception comme le souligne le récent rapport de la Cour des Comptes. Aujourd’hui, à peine plus de 20% des radiologues exercent leur activité à l’hôpital public, alors que plus de 80% de la permanence des soins y est effectuée.
Pour y remédier, il est indispensable de privilégier une organisation souple et mutualisée qui favorise les synergies pour attirer, mobiliser et coordonner les radiologues formés et compétents en imagerie des urgences.
Dès la fin des années 2000, les révolutions technologiques numériques ont permis aux médecins radiologues français d’envisager leur activité à distance.
En téléradiologie (ou radiologie à distance), une nouvelle forme de relation médecin-patient s’est ainsi généralisée. Pour le patient, l’organisation est transparente, quelle que soit l’heure ou le lieu de sa prise en charge. L’examen d’imagerie le plus adapté à sa pathologie est réalisé sur place par les équipes soignantes locales (brancardiers, manipulateurs radio), après discussion entre l’urgentiste et le radiologue à distance.
Pour les hôpitaux, cela change tout. C’est un accès continu à une imagerie de qualité, sous la responsabilité du radiologue. L’externalisation des ressources radiologiques minimise l’impact de la permanence des soins sur les radiologues locaux, et leur permet d’assurer la qualité des examens d’imagerie programmés.
Que l’interprétation des images soit effectuée par des radiologues en équipe dans des centres de garde dédiés ou depuis leur domicile, la téléradiologie joue aujourd’hui un rôle central dans la gestion des urgences radiologiques. Actuellement, dans une majorité des hôpitaux publics français (métropole et outre-mer), la permanence des soins en radiologie est en partie assurée selon ce modèle. La radiologie à distance doit être considérée comme une brique de l’organisation globale, permettant à l’échelle de chaque territoire de santé de développer de nouveaux projets en optimisant les ressources humaines radiologiques locales.
Si la réflexion des radiologues sur l’organisation des urgences n’a pas attendu la crise actuelle, c’est que les radiologues ont su, depuis plusieurs années, prendre en compte les enjeux et les contraintes de l’hôpital public. Nous nous sommes organisés en conséquence pour offrir la meilleure prise en charge médicale possible pour les urgences radiologiques.
La mise en place de la téléradiologie participe ainsi, jour et nuit, sans interruption, au diagnostic des patients. Elle lutte contre les déserts médicaux géographiques et horaires pour répondre à la problématique complexe de l’égalité de l’accès aux soins en urgence : pour tout le monde, partout, et tout le temps.