Commençons ce papier en enfonçant quelques portes ouvertes. L’allemand est la langue de la philosophie, l’italien celle de la poésie, le russe est fait pour le roman. Voilà, c’est complètement réducteur, à la limite du parodique, et pourtant… Pourtant force est de constater (à nouveau) que les romanciers russes ont quelque chose que les autre n’ont pas. Il suffit de lire Les anarchistes, dernier roman d’Alexander Ilichevsky publié aux éditions Gallimard pour s’en (re)convaincre.
C’est un roman total. Total au sens où il traite de tout, aborde tous les styles. Humour, philosophie, spiritualité, quête de sens, quête de soi, passion, violence, douleur. Tout y est, poussé aux extrêmes.
L’histoire, s’il fallait la résumer :
Après de nombreuses années à travailler dans le monde des affaires, Piotr Solomine décide de refaire sa vie sur les bords de la rivière Oka, dans la campagne russe, et de se consacrer à sa passion, la peinture. Le rêve d’une vie d’artiste est cependant bouleversé par son histoire d’amour tumultueuse avec Katia. Le peintre cherche conseil auprès de ses voisins avec qui il discute à bâtons rompus.
Au delà de l’intrigue, on ne peut qu’être frappé par l’espace du roman. Géographique d’abord, avec cette exploration des paysages infinis de la Russie, humain ensuite, avec cette plongée au cœur des êtres, leur failles et leur forces. On peut facilement se perdre au fil des pages tant tout est démesuré. Les noms russes inimitables créant une forme de confusion, les allers-retours dans le temps participent également à cette dissolution des repères. (A lire chez le même éditeur)
Si certains lecteurs resteront hermétiques à cette littérature si singulière, d’autres accepteront avec délectation cette forme d’exotisme, cette idée d’un ailleurs.
