Il suffit parfois de peu de choses pour (re)créer l’envie. Aussi quand Gallimard revient avec une traduction inédite de Manhattan Transfer de John dos Passos, le lecteur en quête de nouveauté s’autorise un retour vers l’ancien.
Nom : dos Passos. Prénom John. Profession : monument de la littérature américaine. C’est tout sauf un inconnu, mais pourtant c’est une figure lointaine et incertaine. John dos Passos fait partie (en France en tout cas) de ces auteurs dont on connait le nom, mais dont on peine à retrouver des lignes, des titres. Une figure centrale, mais pas une figure de proue. Cette nouvelle traduction de Manhattan Transfer, que d’aucun qualifie de chef d’œuvre, constitue donc une bonne porte d’entrée. (A lire aussi)
Le contexte : Manhattan (évidemment), début du siècle dernier. « Il y a ceux qui y débarquent, s’y précipitent, s’y abandonnent. Il y a ceux qui en reviennent, désillusionnés. New York, la ville où chacun a sa chance… Orphelin issu d’une famille fortunée, Jimmy Herf est contraint de devenir journaliste ; George Baldwin, avocat, enrichit son cabinet grâce à une juteuse affaire de dommages-intérêts… Au début du vingtième siècle, les destins de ces personnages s’entrecroisent ou s’entrechoquent. Tous sont emportés par le tumulte et le tintamarre incessants de Manhattan, tous y inscriront à leur manière leur histoire. »
Le livre est déroutant, à la fois moderne et daté. Moderne parce que le style syncopé, haché et vivant porte en lui un souffle peu courant. Daté parce que l’on sent que l’exercice répond d’un autre temps, d’une autre urgence, d’un autre rapport à la littérature. C’est au fond une des singularités propre à toute grande œuvre.
Tout va très vite, trop vite, au rythme de cette Amérique en plein essor, d’une Amérique qui se cherche. Il y a des romans qui valent mieux qu’un livre d’Histoire pour rendre compte d’une époque, Manhattan Transfer en fait définitivement partie.