Méconnu du grand public, le bonsaï reste pour beaucoup un arbre nain exposé par centaines sur les rayonnages des jardineries. Alliant spiritualité et écoute de la nature, le bonsaï est pourtant une véritable œuvre d’art qui a beaucoup à nous apprendre. Entrepreneur dans le secteur de la communication, François Pinochet pratique avec passion l’art du bonsaï depuis ses quinze ans. Son expérience de l’entreprise et sa connaissance du monde végétal lui ont permis de dresser un parallèle étonnant, et pourtant criant de vérité, entre l’organisation d’une entreprise humaine et l’art méconnu du bonsaï.
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Dans un ouvrage alliant l’expérience managériale à de magnifiques photographies d’arbres, François Pinochet invite le lecteur à voir l’entreprise sous un angle nouveau, celui du végétal. L’auteur s’appuie pour cela sur les enseignements de Frédéric Laloux, père du concept d’entreprise libérée, qu’il complète de ses propres observations de chef d’entreprise et bonsaïka. Quel est le point commun entre l’entreprise et ce petit arbre en pot ? Pour le savoir il suffit de se réserver une parenthèse hors du temps pour se mettre à l’heure de la nature. Ré-envisageons nos organisations au travers d’un beau livre : « L’entreprise végétale : le management à l’école du bonsaï ». Widoobiz s’est plongé dans cette œuvre riche d’enseignements dont voici un aperçu.
Petite introduction à l’art du bonsaï
Le terme japonais bonsaï se traduit par « arbre en pot ». Cette technique vieille de quatre-mille ans, consiste à cultiver des arbres dans des récipients. Elle trouve ses origines en Egypte et au Moyen-Orient. C’est plus tard, en Chine, que cet art prend toute sa dimension symbolique. Au XVIème siècle, le bonsaï s’exporte enfin au Japon où il gagne en technique et en esthétique, devenant ainsi un art typiquement japonais, et reconnu comme tel. Conscients du formidable levier d’influence culturel qu’il représente, les autorités nippones encouragent les grands maîtres à former des disciples du monde entier. C’est ainsi que le bonsaï se développe en occident mais y reste un art encore méconnu. Afin d’appréhender le parallèle qui existe entre l’entreprise et l’art du bonsaï, il faut toutefois comprendre en quoi consiste cette pratique. Pour cela, il convient de se détacher de certaines idées reçues.
Parmi les idées fausses auxquelles s’attaquent François Pinochet dans son livre, celle répandue que le bonsaï est en fait une espèce d’arbre nain. À cela l’auteur répond que le bonsaï est identique aux arbres que l’on peut observer dans la nature. Seules les conditions de culture et les soins apportés à la taille de son feuillage et de ses racines font que le bonsaï ne grandit pas. C’est d’ailleurs là que réside l’essence de cette technique : parvenir à évoquer l’allure d’un arbre centenaire, travaillé par les éléments, sur un jeune individu de quelques dizaines de centimètres. L’observateur attentif pourra alors embrasser d’un seul regard toute la majesté de la nature.
Une autre idée reçue que François Pinochet s’emploie à démonter : celle que cette pratique s’apparente à de la torture. S’il est vrai que la croissance du bonsaï est contrainte, notamment par des fils de fer qui appliquent une certaine inclinaison aux branches, il serait faux de penser que celui-ci souffre. Tout simplement parce que les arbres ne disposent pas d’un système nerveux centralisé, encore moins d’une âme. En d’autres termes, les plantes sont incapables d’éprouver de la douleur.
L’auteur explique d’ailleurs que les contraintes imposées à l’arbre par des moyens artificiels, notamment la ligature, ne font que se substituer aux éléments naturels auxquels sont confrontés les végétaux à l’état sauvage. Le bonsaïka ne fait donc rien de plus qu’imiter les effets du temps et des éléments : le poids de la neige, le souffle du vent, la brûlure du soleil, la gravité, autant de contraintes naturelles qui donnent à un arbre son allure et son identité.
De l’entreprise libérée à l’entreprise végétale
François Pinochet le dit lui-même : son livre « n’est pas un énième manuel de management, encore moins un traité sur l’entreprise libérée. » Pour mettre en lumière les correspondances entre l’entreprise et le bonsaï, il estime cependant nécessaire d’expliquer ce concept.
L’entreprise dite « libérée » pose comme principe de base que la performance d’une entreprise ne dépend pas tant de sa structure et de la volonté de ses dirigeants, mais plutôt de l’engagement spontané de l’ensemble de ses équipes. C’est parce que chaque collaborateur trouve sa place dans l’organisation, et parce que chacun est déterminé à faire de son mieux, que l’entreprise vit et grandit. Ainsi, le rôle du dirigeant réside davantage dans le fait de déterminer la mission de l’entreprise, son « pourquoi », plutôt que de s’acharner à imposer un modèle organisationnel, le « comment ». Ce modèle inversé d’organisation nécessite entre autre la confiance, qui doit aboutir à l’épanouissement de chacun en même temps que la réussite économique de tous.
Dans l’introduction de son ouvrage de référence, « Reinventing organizations« , Frédéric Laloux décrit plusieurs types d’organisations. À chaque modèle l’auteur associe un exemple très imagé : le fonctionnement de la meute de loups, de la mafia, de l’armée etc. Cependant, arrivé au modèle « organique » qui correspond le mieux à l’entreprise libérée, l’auteur propose l’image « d’un écosystème qui s’auto-régule ». François Pinochet admet ne pas avoir été très convaincu par cette analogie. Le concept d’écosystème restant à ses yeux assez flou. Il a donc lui-même cherché à illustrer ce modèle grâce à ses propres observations.
C’est ainsi qu’il en vient à dresser le parallèle entre ces deux écosystèmes organiques : le bonsaï et l’entreprise. « Ce rapprochement apparemment incompatible illustre pourtant le paradoxe des enjeux à venir. Maîtriser la croissance dans un monde qui subit l’accélérateur de la digitalisation, et répondre en même temps aux aspirations légitimes des collaborateurs en termes d’épanouissement, d’équilibre et d’harmonie avec LA nature, avec LEUR nature », explique-t-il.
La métaphore du manager bonsaïka : que nous apprend l’art du bonsaï ?
Au travers d’une lecture illustrée de belles images, François Pinochet prend plaisir à filer la métaphore du manager bonsaïka. C’est avec le même enthousiasme que l’on constate à quel point celle-ci tient la route. Nous amenant à considérer le monde de l’entreprise sous un angle nouveau. Quels sont donc les points communs entre le bonsaï et l’entreprise ? Loin de nous l’idée de trop en dévoiler. Voici toutefois un avant goût de l’analogie présentée dans « L’entreprise végétale : le management à l’école du bonsaï ».
François Pinochet attire en premier lieu notre attention sur le champ lexical de l’entreprise qui tend à se végétaliser. Il est devenu courant de parler de « jeunes pousses » pour qualifier des start-up ; On évoque régulièrement la culture d’entreprise ; Les start-up sont incubées dans des pépinières. Autant de termes propres à l’entreprise empruntés au monde du végétal. Ce premier constat est la base de la métaphore que défend François Pinochet. Il poursuit en évoquant le système racinaire d’un arbre qui l’alimente en eau et en minéraux. Essentiels à son développement et à sa survie. La sève brute ainsi créée remonte le long du tronc pour irriguer les branches et les feuilles. Le soleil provoque à son tour la photosynthèse. Le gaz carbonique capté dans l’air s’associe à l’eau remontant des racines pour former une sève élaborée. Celle-ci vient nourrir l’arbre et faire grandir ses racines.
L’entreprise partage ce fonctionnement. Le système racinaire correspond alors à l’ensemble des savoir-faire et ressources (brevets, méthodologies, finances, etc) d’une organisation. Les feuilles correspondent quant à elles aux interactions de l’entreprise avec le lieu d’échange qu’est son marché. Elle y échange des prestations contre une rémunération, quand l’arbre échange de l’oxygène contre du gaz carbonique. Dans cette analogie, le tronc représente le point de circulation de tous les savoir-faire et de l’expérience. À l’instar du tronc d’un arbre, qui chaque année s’épaissit. L’entreprise s’enrichit de ses expériences et s’implante plus solidement sur son marché.
Le principe métaphorique ainsi posé, François Pinochet déroule la comparaison en adoptant l’oeil d’un bonsaïka. Il aborde ainsi plusieurs questions propres à la gestion d’une organisation au travers de son travail avec les bonsaïs. Détecter les signaux faibles de mal-être ; Se séparer d’un collaborateur historique ; Contenir la fougue de la jeunesse ; Sont autant de situations rencontrées par des chefs d’entreprises qui trouvent échos dans l’art du bonsaï. En observant ses arbres comme il appréhende son entreprise, l’auteur effectue un travail de rétrospection. Il en vient jusqu’à s’interroger sur la place que doit occuper le dirigeant…
« L’entreprise végétale : le management à l’école du bonsaï » est édité par l’Arbre de mai. Il est disponible à la vente sur le site : www.arbredemai.store. Recevez votre livre dédicacé en indiquant le code « Dédicace », lors de votre commande.
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