C’était une image forte. Un ancien premier ministre, masqué, interrogé par une commission d’enquête parlementaire quelques jours après avoir vu son domicile perquisitionné. Il y avait une forme de gravité dans la scène. Et cette question posée, comment agir en temps de crise avec, comme une épée de Damoclès, la crainte de se voir renvoyé devant les tribunaux.
Il sera toujours aisé, dans quelques mois, quelques années, de dire ce qu’il aurait fallu faire face à cette crise. On est toujours meilleur en pronostic quand on a déjà le résultat du match. On peut critiquer les choix du gouvernement, il le faut, on peut interroger les acteurs, demander des comptes, c’est le propre même d’un régime démocratique, mais il y a un timing. C’est une forme d’indécence que de voir des ministres en exercice rendre des comptes tout en devant gérer la crise. Les temporalités se chevauchent, trop vite.
Décider, c’est choisir et cela ne peut se faire « quand vous avez immédiatement le risque pénal sur le dos », pour paraphraser Edouard Philippe. Le risque est double. Choisir de ne plus rien faire, ne plus décider pour ne pas commettre d’erreur, de plus rien dire pour ne plus rien regretter, ou à l’inverse, sombrer dans une stratégie du tout risque zéro, du tout sécuritaire, ceinture et bretelle.
Vraiment, il y avait quelque chose de gênant dans cette scène, une forme d’ingratitude. Il y a certainement eu des manques, des loupés, mais pouvait-il en être autrement ? En février dernier, qui aurait pu penser un instant que nous en serions là. Wuhan était loin, très loin. Cette maladie presque inconnue. Alors oui, inévitablement, un certain nombre de décision on été prises dans l’urgence, dans le noir les yeux bandés. Le gouvernement a fait comme il a pu, tout simplement. Peut être bien, peut être mal, mais comme il a pu.