Dans une interview accordée au Parisien, Elisabeth Moreno, ministre déléguée en charge de l’Égalité entre les femmes et les hommes. Se dit favorable à un allongement du congé paternité. Celui-ci passerait de 11 jours à un mois. Une réforme que la ministre qualifie de révolution et qui pourrait permettre un partage plus équilibré de la charge familiale entre les hommes et les femmes.
Symbole des inégalités salariales qui existent encore dans les entreprises françaises, la différence entre le revenu brut des hommes et celui des femmes s’élève à environ 24%. Cet écart de salaires résulte de maux profondément ancrés dans l’entreprise et dans la société. Parmi eux, la question de la parentalité occupe une grande place dans le débat en faveur de l’égalité salariale.
Égalité salariale, ne pas traiter uniquement le symptôme
Les écarts de rémunération cachent des maux plus profonds ; Comme le plafond de verre, quand les femmes ne peuvent pas accéder à des postes à haute responsabilité, ou les parois de verre, quand elles sont surreprésentées dans certains secteurs ou métiers. Traiter ces inégalités seulement au niveau de la rémunération reviendrait alors à ne traiter qu’un symptôme sans guérir le mal. Car le plafond comme les parois de verre, résultent bien souvent d’une interruption de carrière, notamment au moment de la maternité, qui défavorise l’accès des femmes à des postes hautement rémunérés.
Selon une étude de l’Insee menée en 2019, la naissance d’un enfant entraînerait chez la femme une diminution d’en moyenne 20% de son revenu salarial, cinq ans après l’arrivée de celui-ci. Alors qu’elle n’a presque aucun impact sur le salaire des hommes. La parentalité apparaît alors comme une question indispensable à traiter pour espérer rétablir une égalité de rémunération entre les hommes et les femmes.
Allongement du congé paternité pour plus d’égalité salariale
L’arrivée d’un enfant demande une grande implication auprès de la famille et beaucoup d’organisation. Elle nécessite un certain temps d’adaptation pour les parents afin de prendre leur rôle dans la sphère familiale. Ce temps consacré à la famille est un temps qui n’est pas investi dans l’entreprise. C’est ainsi que la parentalité engendre bien souvent une perte d’opportunités professionnelles. Or, bien souvent, ce sont les femmes qui assument l’impact de la charge parentale.
De fait, la législation française prévoit que la femme reste 16 semaines en congé maternité. Tandis que l’homme ne peut consacrer que 11 jours à son nouveau né. Même si le père souhaite s’investir davantage dans sa vie de famille, il n’en a pas la possibilité. C’est à ce niveau que se joue l’égalité entre les femmes et les hommes. Alors que les rôles s’établissent au sein du foyer. La mère s’organise pour s’occuper de son enfant, quand le père est poussé à reprendre le travail. À leur retour de congé maternité, les femmes subissent les conséquences de cette interruption de carrière et de ce nouveau rôle de mère, très prenant, qui les freine dans leur évolution professionnelle. Une étude de l’IGAS souligne d’ailleurs que le congé paternité favoriserait l’engagement paternel et la construction durable d’un lien entre le père et son enfant. Ce lien permettrait notamment une répartition plus équilibrée de la charge mentale au sein du couple.
Cette inégalité face à la charge familiale engendre également des discriminations à l’embauche. Et se résume en cette simple question essentiellement posée aux femmes : « Envisagez-vous d’avoir des enfants ? ». Et même si l’interrogation n’est pas clairement énoncée, un recruteur pourra préférer un profil masculin à un profil féminin. Par crainte d’une absence prolongée au moment de la maternité. Embaucher un homme semble garantir plus de stabilité. Dès lors, l’allongement du congé paternité représente un rééquilibrage entre les femmes et les hommes face à cette discrimination à l’embauche.
Le Parental Act : une initiative des entreprises en faveur de l’égalité salariale
La maternité apparaît donc comme une étape qui cristallise les inégalités entre les hommes et les femmes. Fatigués d’attendre une réponse du gouvernement, trois chefs d’entreprise. Céline Lazorthes, Isabelle Rabier et Thibault Lanthier, ont souhaité faire de l’entreprise un moteur du changement social. Depuis février 2020, ils ont rassemblé plus de 300 entreprises autour d’un engagement concret : le Parental Act. En signant cette charte, les dirigeants s’engagent à mettre en place dans leur entreprise un congé paternité d’un mois minimum et 100% rémunéré s’appliquant au second parent.
Dans leur tribune des Echos, publiée en février 2020, les dirigeants signataires déplorent le retard de la France sur la question du congé parental partagé. Ils estiment que malgré l’introduction d’un congé de paternité en 2002. « le dispositif reste centré autour de la femme qui porte l’enfant ». Il semble alors grand temps de prendre exemple sur nos voisins. Comme la Finlande qui annonçait en février 2020 un allongement du congé paternité pour atteindre la même durée que celui des mères.
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