Les activités en lien avec des équidés démontrent chaque jour l’intérêt et les bienfaits des poneys et chevaux dans l’accompagnement des personnes en situation de handicap ou en difficultés psycho-sociales. Depuis déjà plusieurs années, la Fédération Française d’Équitation œuvre pour donner accès à l’équitation à tous. C’est d’ailleurs l’une des premières fédérations sportives à s’ouvrir à d’autres compétences que le sport. En 2017, elle crée le réseau Cheval et Diversité qui incarne ses valeurs et dont la volonté est de rapprocher les différents acteurs afin de fluidifier le parcours des personnes en situation de handicap ou en difficultés psycho-sociales.
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« L’équitation ? Mais ce n’est pas un sport ». Effectivement, c’est bien plus que cela ! Inutile de convaincre les cavaliers passionnés, ils connaissent déjà les multiples facettes de cette activité aussi subtile que méconnue. Bien plus qu’une discipline olympique, l’équitation représente l’unique sport qui se pratique avec un animal porteur. Elle offre donc l’heureux paradoxe d’être un sport individuel qui se pratique en équipe : un cheval et son cavalier. Outre son caractère sportif, le milieu équestre présente une multitude d’activités en lien avec l’animal. Parmi elles, la médiation avec un équidé participe à l’aspect inclusif de cette pratique. En quoi le cheval est-il le parfait partenaire pour accompagner des personnes fragiles ou en situation de handicap ? Carole Yvon-Galloux, chargée de mission santé, soins, handicap et inclusion au sein de la Fédération Française d’Équitation nous fait découvrir les richesses de la relation au cheval.
Le cheval médiateur : des qualités naturelles
Tous les animaux ont quelque chose à apporter, mais le cheval a des qualités propres à sa nature qui font de lui un parfait médiateur. Tout d’abord parce qu’à l’état naturel, le cheval est un animal grégaire. Il aime évoluer en groupe, qu’il soit composé de chevaux ou d’humains. Animal de proie, il interroge sans cesse son environnement afin de déterminer s’il doit fuir un danger. Pour cela, il n’utilise pas uniquement sa vue, son ouïe ou son odorat. Il va notamment se fier à ses sensations pour capter les intentions de celui qui se trouve en face de lui. Ainsi, le cheval se méfiera de quelqu’un qui n’est pas cohérent. Un individu qui, par exemple, se montre calme alors qu’il est en fait très angoissé, n’obtiendra pas sa confiance. En revanche, le cheval n’aura aucun problème à interagir avec une personne qui assume complètement son anxiété.
Par ses réactions, il agit alors comme un miroir et nous révèle nos angoisses, nos attitudes, nos complexes. Et parce que nos incohérences s’avèrent extrêmement inconfortables pour lui, il nous pousse à nous mettre d’accord avec nous-même. D’autre part, parce qu’il vit dans l’instant présent et qu’il ne juge pas, le cheval s’avère être un excellent partenaire pour accompagner des personnes fragiles, nécessitant un soutien psychologique, en rupture sociale ou souffrant d’un handicap. Il est d’ailleurs remarquable de voir de jeunes autistes évoluer au contact d’un cheval. Ce dernier, malgré les cris et les mouvements brusques de l’enfant, ne bouge pas d’une oreille. Il ne prend pas peur. C’est parce que l’enfant autiste est cohérent avec ce qu’il est. Peu importe s’il est angoissé, heureux, s’il crie, s’il s’agite, car ce qu’il montre est en accord avec ce qu’il est, ce qu’il ressent.
Outre cet aspect thérapeutique, le cheval se présente comme un très bon coach de développement personnel ou professionnel. La médiation avec un équidé s’utilise d’ailleurs fréquemment en séminaires d’entreprise, pour coacher des managers et des équipes. Au contact du cheval, les directeurs travaillent leur position de chef, leur leadership, et les collaborateurs leur esprit d’équipe. La médiation équine qui favorise le lâcher prise, aide également à prévenir le burn out. Cette rencontre avec l’animal, et avec soi-même, se fait essentiellement à pied et en liberté. Cavalier ou non, tout le monde peut donc participer à ces séances, sans aucune discrimination.
Un nouveau regard sur le handicap grâce au cheval
En 2019, la Fédération Française d’Équitation s’est rapprochée de France Alzheimer afin de construire un projet commun : l’accompagnement de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer avec des chevaux. Les centres équestres disposent des compétences, de la cavalerie et des infrastructures adaptées pour accueillir ces personnes. Le principal symptôme de la maladie, ou du moins le plus connu, consiste en une perte progressive de la mémoire. Avec celle-ci, les patients perdent aussi leur capacité à se projeter dans l’avenir et à s’exprimer. On parle alors de la perte du mot. Or le cheval n’a pas besoin de la parole pour communiquer. C’est en cela que la rencontre entre des personnes souffrant d’Alzheimer et le cheval est si belle et surprenante. Ils n’ont pas besoin de mots pour se comprendre.
En tant que cadre de santé, Carole Yvon-Galloux a géré une maison de retraite. Elle nous raconte cette anecdote : « Un jour on a fait venir des chevaux. Et les résidents, alors qu’on devait toujours trouver des stratagèmes pour les faire sortir de leur chambre, ont fini par descendre. Le cheval suscite l’envie de faire les choses, de venir vers lui ». Cela se retrouve lors de séances de médiation. Certains patients, habituellement incapables de se nourrir seuls en institution, viennent spontanément brosser le cheval. Parfois, l’animal va vouloir aller brouter, mais étonnement il va attendre celui qui l’accompagne. Il va même tolérer que l’on s’appuie sur lui. Ainsi, les personnes âgées atteintes de la maladie d’Alzheimer ou non, vont pouvoir se défaire un instant de leur déambulateur et augmenter leur périmètre de marche.
Encore plus remarquable, au contact du cheval, les patients se tiennent plus droit. Dans notre imaginaire c’est le chevalier ou la princesse qui sont à cheval. Quelqu’un qui se trouve à côté de lui prend donc naturellement de la hauteur, de l’estime de soi. Il se redresse. Le cheval aussi se prend au jeu. Certains font les fiers car ils sentent que la personne à leur côté en a besoin. Et à ce moment, le regard de l’entourage change ! L’aidant voit la personne qu’il assiste quotidiennement en capacité de faire les choses. Les parents sont fiers de leur enfant. On se met à voir la personne avec toutes ses capacités et non plus ses incapacités. C’est aussi valable avec le handicap chez des cavaliers de haut niveau. Au début les gens se focalisent sur le handicap mais au bout d’un moment, ils ne le regardent même plus.
Le monde du cheval : des activités accessibles à tous
La médiation intervient auprès des personnes en situation de handicap pour les aider à accepter ou à mieux vivre leur handicap. Pour autant, elles ne sont pas exclues de la pratique sportive de l’équitation. Bien au contraire, les centres équestres français accueillent plus de 150 000 cavaliers en situation de handicap. Si certains suivent des parcours de médiation, une grande partie d’entre eux pratiquent une équitation adaptée. De nombreux cavaliers atteints d’un handicap intègrent d’ailleurs chaque année des cours collectifs, dans des groupes spécifiques mais aussi dans des reprises classiques en compagnie d’autres cavaliers ne souffrant d’aucun trouble. La FFE possède également la délégation pour le paradressage qui participe aux Jeux Olympiques. « La Fédération Française d’Équitation a cette volonté de montrer que même handicapé on peut non seulement pratiquer mais être aussi performant que les autres ! » déclare Carole Yvon-Galloux.
C’est cela l’inclusion ! Tout dépend de ce que ces individus souhaitent faire. Certains vont vouloir une prise en charge très spécifique quand d’autres voudront au contraire qu’on ne voit pas leur handicap. Un jeune cavalier en situation de handicap, s’il sait faire de son cheval un bon partenaire peut être aussi performant, voire plus, qu’un cavalier valide qui ne joue pas la carte de la complicité. « Le cheval va compenser le handicap. Et nos cavaliers de haut niveau de paradressage n’ont rien à envier à personne », assure Carole Yvon-Galloux. C’est d’ailleurs en observant un cavalier atteint d’un handicap physique que l’on se rend compte de la force du mental et de l’intention nécessaires en équitation. L’impulsion ne provient pas uniquement des aides physiques (jambes, bras, bassin). C’est l’intention, la tonicité, qui vont faire que le cheval, même sans aucun ordre physique, répondra à la demande de son coéquipier.
Ce partenariat avec le cheval nourrit la passion des personnes qui pratiquent une activité équestre. Et pour vivre cette relation unique, nul besoin d’être cavalier ou de savoir monter. Riche de ses 32 activités, allant du saut d’obstacle à la médiation, en passant par l’attelage, la randonnée ou le travail à pied, le monde du cheval est accessible à tous. Cavalier, manager, personne en situation de handicap ou tout simplement curieux, chacun peut trouver son bonheur dans un centre équestre. C’est pour toutes ces raisons, toutes ces richesses, que la FFE s’investit depuis des années dans le développement de la médiation avec des équidés et pour rendre la pratique équestre accessible à tous.
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Par Doré, le 03 juillet 2020