Comment le groupe Expedia a-t-il vécu la crise qui a ébranlé le tourisme mondial ? Quel plan de relance pour l’une des plus grandes agences de voyage en ligne ? Quels nouveaux comportements émergent à l’aune de l’épidémie de Covid-19 ? Réponses avec Olivier Pernoud, directeur des marchés, pour l’Europe du Nord, du groupe Expedia.
L’industrie de l’hôtellerie et du tourisme a été l’un des secteurs les plus touchés par la crise, quelles ont été les conséquences pour Expedia ?
Olivier Pernoud : La crise du Covid-19 a impacté de manière importante le secteur du tourisme et ce dans son ensemble. Expedia n’a pas fait exception. En effet, le groupe est une des plus grandes agences de voyage en ligne. Nous vendons à la fois des billets d’avion, des hébergements et des activités, et cela implique que nous avons accusé une baisse de l’ordre de 80% du nombre de réservations. Nous avons dû d’abord faire face, d’un point de vue opérationnel, à un nombre sans précèdent de réclamations. Le volume d’appel a été multiplié par 100. Un afflux massif auquel nous avons pu faire face grâce à la technologie mise à disposition. Très vite, nos partenaires ont pu s’approprier ces outils afin de pouvoir gérer eux-mêmes leurs réservations, informer les clients de la fermeture de leur établissement et leur proposer de reporter leur séjour à une date ultérieure. Il a fallu être aussi bien à l’écoute des partenaires et de nos clients. Désormais, nous nous projetons sur l’avenir
Qu’a révélé cette crise selon vous ?
O.P : Plusieurs choses, la première est que Le secteur du tourisme est interconnecté. Les compagnies aériennes, les hôtels, les agences de voyage, les clients, les collaborateurs, les organismes qui visent à la promotion du tourisme… Toutes ces entités ont été très touchées et c’est la raison pour laquelle dans le plan de relance que nous avons entamé, nous nous adressons à trois catégories d’acteurs du secteur du tourisme : les partenaires, les destinations et les collaborateurs. Nous avons ainsi mis en place des initiatives à l’aune de chacun. La semaine prochaine, nous lancerons, par exemple, un programme qui s’appelle Expedia Group Academy sur linkedin. C’est une page sur laquelle nous allons intégrer du contenu qui s’adresse à tous les collaborateurs du secteur du tourisme. Elle sera destinée aux personnes qui n’ont plus d’emploi aujourd’hui et à celles qui se posent des questions. Nous allons leur permettre de développer leurs compétences à travers des formations commerciales ou encore managériales. De nombreuses personnalités du tourisme interviendront dans cette page pour s’adresser à cette audience.
Pour contribuer au rayonnement de nos destinations, nous travaillons également sur des campagnes marketing pour restaurer l’appétit de nos touristes. Si vous vous rendez sur expedia.com, vous avez la possibilité d’assister à un concert de la philharmonie de Berlin en virtuel. Des campagnes destinées à donner l’envie aux gens de se rendre sur place.
Expedia Group s’engage à verser 275 millions de dollars à ses partenaires pour soutenir la relance de l’industrie touristique. Comment cette aide va-t-elle s’articuler ?
O.P : Nous avons mené une étude auprès de nos partenaires pour savoir ce qu’ils attendaient du groupe Expedia. Les réponses se sont articulées autour de plusieurs axes. Le premier est la data. En effet, le partage des données d’Expedia aide à la prise de décision de nos partenaires. Grâce à la technologie de Market insight, nos partenaires peuvent faire appel gratuitement à des outils d’aide à la tarification, se reposer sur des données pour estimer les périodes d’affluence, d’où est ce qu’il vient. Chaque hôtelier peut, par exemple, voir quel est le nombre de visiteurs sur les sites d’Expédia recherchant sa destination. C’est un indicateur important qui permet aux établissements de savoir si oui ou non ils doivent ouvrir leurs portes. Et aussi d’en apprendre sur leurs clients comme leur provenance et les dates de séjour recherchées. C’est un outil sur lequel nous allons investir davantage pour l’améliorer et qui est vraiment le témoignage de la volonté d’Expedia de s’axer sur le partage des données.
Le second axe est financier. Nos partenaires ont besoin que nous les aidions à stimuler la demande et d’aider les hôteliers indépendants à maintenir leur trésorerie. Dans ce sens, nous avons mis en place un programme pour nos partenaires sur la base du volontariat. Il comprend trois éléments :
La possibilité de se mettre en avant à travers des crédits marketing octroyés à nos partenaires pour augmenter leur visibilité aux dates de leur choix.
L’utilisation des données qui est un instrument majeur pour leur objectif de relance.
Le programme prévoit ensuite une baisse du taux de commissions perçues par le groupe Expedia afin de redonner du souffle dans les finances de nos partenaires. Ils se verront également octroyer la possibilité de payer leurs factures après un délai de 3 mois.
La crise va changer la donne en matière de tourisme, quels sont les nouveaux comportements qui vont émerger de cette crise ?
O.P : On voit que l’engouement pour les réservations domestiques se développe de plus en plus. En effet, les destinations françaises sont redevenues prisées par les clients français. C’est une bonne chose mais le tourisme international représente une manne considérable pour le tourisme français. Certaines destinations s’en sortent toutefois mieux que d’autres. En effet, nous voyons que les grandes villes internationales vont mettre plus de temps à redémarrer par exemple car elles sont liées au business du trafic aérien en dehors de l’espace Schengen. Les attentes de nos clients ont également changé, il y a un réel intérêt pour les mesures sanitaires mises en œuvre par les établissements où ils souhaitent séjourner.
Nous allons travailler avec nos partenaires pour rendre le plus visible possible toutes les mesures sanitaires qui sont prises : possibilité de checking en ligne, fréquence à laquelle la chambre est nettoyée, service petit-déjeuner en chambre… Ces informations seront visibles grâce à notre agilité technologique.