La crise du Covid-19 a agi comme un révélateur d’utilité. Si certains, il y a encore quelques mois, pouvaient s’interroger sur le rôle véritable des ressources humaines au sein d’une organisation, chacun comprend aujourd’hui leur importance, leur raison d’être. Entretien avec Sébastien Amara, DRH de Quadient France (ex Neopost).
Quel était le quotidien d’un DRH d’un grand groupe pendant cette période de crise sanitaire ?
En premier lieu le pilotage, en lien étroit avec le comité de direction, du plan de prévention des risques et celui de continuité des activités. Très vite, à partir du décrétèrent du confinement, il nous a fallu évoluer sur les sujets de généralisation du télétravail, sur la mise en place du chômage partiel, sur le plan de charge d’activité tout simplement. Quand on traite ces sujets, on comprend qu’il y a deux aspects à prendre en compte. D’une part la dimension technique, législation, information des parties prenantes, et de l’autre l’humain, avec la communication, l’engagement managérial. Tout cela ne peut se faire sans dialogue, ni confiance.
Le dialogue justement, comment le met-on en place à distance ?
Il y a bien sûr les notes d’information, mais nous avons surtout insisté sur le canal managérial. Tout est allé plus vite, avec plus d’intensité. Nous avons également des outils digitaux qui ont très bien marché qui permettent aux collaborateurs de continuer à discuter, se voir, travailler ensemble même à distance.
Cette crise a-t-elle replacé les RH au cœur de l’entreprise ?
Inévitablement. Les sujets étaient des sujets RH, il n’y avait qu’à regarder les ordres du jour des différents Comex pour en prendre la mesure. On parlait de sécurité des personnes, de management, de cadre juridique…
Le Covid a-t-il créé une fracture entre les salariés, logement, connexion… ?
Nous étions préparés à la généralisation du télétravail depuis plus d’un an. C’est dans la nature même de notre entreprise avec de nombreuses populations itinérantes. La séquence de grève de fin 2019 nous a permis de tester la résilience de notre dispositif. Donc d’un point de vue purement technique, nous étions parfaitement équipés.
Après la technique, on entre dans une dimension plus individuelle, personnelle, avec un grand nombre de singularités. Nous avons fait tout ce que nous pouvions, en permettant à nos salariés de passer en arrêt pour garder leurs enfants si besoin. En permettant le retour au bureau, sur la base du volontariat. On ne parle peut être pas assez de la difficulté de cette période pour les managers, qui devaient gérer une attente opérationnelle forte et une nouvelle donne familiale.
Le Covid a-t-il agi comme un accélérateur de transformation digitale ?
Nous sommes une entreprise en transformation. Nos métiers changent, nos produits et services changent, notre organisation aussi. Le fait de passer à la vente massive de produits digitaux a forcément accéléré notre propre mutation, cela a agi comme une prise de conscience collective. Sur les sujets de télétravail, nous avions donc déjà une grande maturité collective et chacun a pu mesurer la valeur ajoutée du digital. Signature électronique, partage de documents, réunions en visio…
Comment voyez-vous le retour au bureau ?
Nous avons terminé notre consultation autour du plan de reprise. Nous nous sommes mis en phase avec les préconisations du gouvernement et avons beaucoup échangé avec l’ensemble de nos partenaires. Notre parti pris c’est le volontariat, avec un taux d’occupation de 50% maximum. Nous avons des collaborateurs pressés de revenir, d’autres en crainte. Nous misons sur un phénomène d’entrainement commun.
En conclusion, quels enseignements tirez-vous de cette crise ?
Quand on fait sauter les barrières, psychologiques notamment, on peut créer très vite de nouvelles choses. On découvre que l’on peut faire différemment et mieux. Cette période très difficile nous a néanmoins fait franchir collectivement un cap bénéfique. Nous portons un nouveau regard sur nous-même et sur le futur de l’organisation du travail dans l’entreprise.