Le e-commerce est-il le grand gagnant de cette crise ? A quels secteurs profite la situation actuelle ? Eclairage de Jonathan Vidor, président et fondateur de JVWEB.
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Quel est votre constat sur le e-commerce à l’aune de la crise ?
Globalement les e-commerçants ont connu une progression du chiffre d’affaires sur la période de confinement s’ils ont pu continuer d’expédier et de livrer.
Parmi nos clients, on a observé 3 modèles. Les petites boutiques qui enregistrent des résultats très variables mais globalement une baisse de chiffre d’affaires car peu de visibilité et peu de notoriété. Il reste les avis des consommateurs pour rassurer les nouveaux visiteurs mais il n’existe pas d’action structurée pour faire face à la crise. Il y a ensuite les Pure Players installés. Ce sont des acteurs qui ont pour la plupart été capables d’assurer leurs livraisons et ont su adapter leur communication. On constate globalement une augmentation du chiffre d’affaires pour eux.
Viennent ensuite les Clic & Mortar qui ont connu une énorme hausse du chiffre d’affaires online mais qui ne compense tout de même pas pas la perte des ventes en magasins.
A quels secteurs cela a profité ? Lesquels au contraire en ont pâti ?
La situation est très disparate. Cela varie de -100% quand le marchand est fermé pour des raisons de stocks ou d’impossibilité de livraison, à +300% dans l’alimentaire. Sur la partie alimentation on est à plus de + 300 % de demande sur les Drive, les épiceries en ligne et les services de livraisons de paniers repas. Les grands gagnants sont également le secteur du sport à domicile, les jouets, jeux et dans une moindre mesure les fournisseurs de biens brico, jardin et maison. Il ne faut pas oublier le business du dématérialisé (VOD, jeux vidéo, applications, fitness…). Du côté des parapharmacies et des distributeurs de matériel médical, dans le B2C comme dans le B2B, on observe une forte augmentation des commandes et du panier moyen, c’est la disponibilité du stock qui devient problématique pour pouvoir assurer la demande. Les secteurs qui ont le plus souffert en revanche en ligne, sont le tourisme (transport, hôtellerie), mais aussi la bagagerie, accessoires auto, les petites annonces et dans une moindre mesure la joaillerie.
Les plateformes de e-commerce sont-elles désormais la seule solution pour les commerçants ?
La seule solution, pas forcément. Beaucoup de boutiques de proximité réussiront à se maintenir sans digitaliser leur activité mais elles se développeront moins vite que leurs concurrents. De nombreux français sont devenus pendant la crise tributaires de la digitalisation du
commerce avec parmi eux des digitaux sceptiques. Sur les 2 mois de confinement, ce sont 2 millions de Français qui ont effectué leur premier achat sur internet. Cette population vient de faire une nouvelle expérience de la commande en ligne et c’est pour beaucoup d’entre eux certainement le premier pas vers ce qui va devenir une habitude. Beaucoup de commerçants ont profité de cette période sans activité pour se lancer en ligne via les places de marché ou sur leurs propres sites, c’est un excellent premier
pas pour diversifier ses sources de revenus. La demande en création de sites e-commerce a augmenté de + 42 % pendant le Covid. C’est le cas de Carrefour qui a lancé sa plateforme “Les Essentiels Carrefour” pour proposer, à l’heure du confinement, des paniers de produits alimentaires basiques aux consommateurs.
Comment voyez-vous le futur du e-commerce ? Est-ce que vous imaginez une digitalisation de tous les commerces de proximité ?
Pour le e-commerce, cette crise aura eu pour effet trouver de nouveaux consommateurs. Ce fut aussi l’occasion pour certaines boutiques de profiter de la baisse des coûts publicitaires pour gagner en visibilité. Le e-commerce va donc logiquement continuer à se développer. L’effet covid-19 dans notre société ne va pas disparaître du jour au lendemain. Pour pouvoir maintenir l’activité, en priorité il faut penser réorganisation des activités pour garantir la sécurité des collaborateurs avec les gestes barrières ainsi que les gels et masques. Dans le même temps il faut aider ses fournisseurs, clients et partenaires car cela aidera en retour les commerçants du retail. Encore une fois, nous avons observé pour les commerces de proximité une digitalisation progressive avec une zone de livraison limitées et s’appuyant sur des réseaux de distribution ou de communication locales. Il y a fort à parier que ce modèle qui se développe avec à côté de ça une population qui jusqu’ici ne commandait pas sur internet mais commence à s’y mettre va produire de nouveaux débouchés
pérennes pour le e-commerce de proximité.