C’était encore un marché de niche il y a quelques mois. C’est devenu une nouvelle norme. Retour sur le boom de la télémédecine et sur les perspectives du secteur avec Marie-Laure Saillard, CEO de MesDocteurs et vice-présidente de L’association des Entreprises de Télémédecine (LET).
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Après deux mois de confinement, comment se porte le secteur de la télémédecine ?
Toutes les crises accélèrent les innovations et leurs usages. Celle que nous traversons a fait faire un bond à la télémédecine dans toutes ses dimensions. Téléconsultation, télésurveillance et aussi télésoin, et profite à tous les professionnels de santé. Les infirmiers, les médecins libéraux et les hospitaliers, aux patients bien entendu. Et les opérateurs de télémédecine dont les solutions étaient prêtes depuis un moment.
Entrée dans le droit commun en 2018, la téléconsultation peinait jusqu’alors à s’installer. Pendant cette crise, son cadre réglementaire a été élargi. Ce qui lui a permis de prendre toute sa place dans le dispositif de santé. En faisant la démonstration immédiate de son utilité. Elle a contribué à soulager les sollicitations au SAMU centre 15 au pic de la crise il y a quelques semaines. En prenant en charge les patients à distance et en limitant aussi la contagiosité en jouant un rôle clé de mesure barrière.
En donnant la possibilité aux médecins de continuer à exercer, elle a également facilité le suivi des malades chroniques qui ont besoin d’un accompagnement et d’une surveillance appuyée. Ces cas d’usage devraient perdurer pour une très grande majorité pendant cette période de déconfinement et après. J’ajouterai également qu’elle représente une vraie solution opérationnelle pour lutter contre les déserts médicaux en facilitant l’accès aux soins pour tous.
Quelles ont été les conséquences sur l’activité, quels sont les enseignements ?
Les usages patients et médecins montent significativement sans commune mesure avec ceux observés avant la crise sanitaire. En 2019, on ne comptait que 75 000 téléconsultations remboursées par la CNAM. Elles représentent désormais 30 % de l’ensemble des consultations. Avec 1 million de téléconsultations réalisées par semaine au pic épidémique en mars dernier. Et c’est sans compter sur les téléconsultations financées par les complémentaires santé pour leurs bénéficiaires qui se chiffrent par centaines de milliers.
Chez MesDocteurs, les volumes ont été très rapidement multipliés par 6 ou 10 en fonction de nos services. Téléconsultation non programmée pour les adhérents des complémentaires santé et solution de téléconsultation sur rendez-vous pour les professionnels de santé avec leur patientèle.
Cette crise a permis de lever des freins relevant de perceptions erronées et de craintes; Manque de proximité avec le médecin, doutes sur l’efficacité des diagnostics réalisés à distance. Ou encore complexité liée au numérique… Ce déploiement à grande échelle forcé par le contexte sanitaire va avoir donné à chacun sa propre courbe d’expérience. Pour mesurer la valeur ajoutée de la téléconsultation dans son quotidien. Sa pertinence mais aussi sa simplicité, son accessibilité et sa complémentarité avec les consultations en présentiel.
Comment accompagner les entreprises dans leur déconfinement ?
Confrontées aux questions liées à l’absentéisme, les entreprises accordent de plus en plus d’importance à la santé et au bien-être de leurs collaborateurs. La crise a amplifié cette nécessité. Et beaucoup d’entre elles se soucient d’une reprise d’activité sécurisée d’un point de vue sanitaire et médical. Ajoutons à cela que les nombreuses problématiques d’accès aux soins sur les territoires confrontées à la désertification médicale. La téléconsultation est un vrai levier au service de leurs collaborateurs. MesDocteurs propose aux entreprises de mettre à leur disposition une plateforme d’accompagnement médical et psychologique avec sa communauté médicale disponible 24h/24 et 7j/7 sans rendez-vous. Ce type de dispositif, déjà en place du côté des grandes entreprises. Nous pensons tout particulièrement aux nombreuses entreprises de taille intermédiaire. Qui peuvent se retrouver désarmées dans cette situation complexe d’épidémie qui dure.
La télémédecine a-t-elle vocation à devenir la nouvelle norme ?
La télémédecine n’a pas vocation à devenir une norme, et encore moins à venir se substituer à d’autres pratiques médicales. C’est un levier supplémentaire à la disposition des médecins pour améliorer l’efficacité des pratiques et la prise en charge et le suivi des patients. Par exemple, la téléconsultation qui est un des 5 actes de la télémédecine n’a pas vocation à remplacer la médecine présentielle. Elle intervient en complémentarité dans les parcours. Où elle crée de la valeur pour les professionnels de santé et pour les patients. Le territoire est le bon échelon pour ajuster au mieux sa contribution. En tenant compte des problématiques de démographie médicale et de besoins identifiés dans l’offre de soins par les professionnels de santé, les acteurs locaux et les patients. C’est un principe clé de la stratégie des pouvoirs publics #MaSanté2022 à laquelle nous collaborons activement.