« Le progrès a encore des progrès à faire » – Philippe Meyer
La crise historique de la pandémie du coronavirus, comme toute crise, tient en elle le triste tandem du tragique et de l’utile. Autrement dit, c’est dans l’épreuve que l’on apprend, c’est du moins ce que le devoir de mémoire cherche à nous enseigner.
Personne, à l’heure actuelle, ne peut véritablement affirmer qu’il y aura un avant et un après coronavirus, ou si les choix politiques se tourneront vers une version raisonnée de notre système politique, social et économique.
Une chose est pourtant certaine, même si le système ne se réforme pas, cette crise aura eu le mérite de propulser sur le devant de la scène les « indispensables » : ces personnes dont le système est incapable de se passer prennent désormais toute la lumière, et peuvent jouir le temps d’un instant de ne plus passer par la porte de service.
Que ces piliers soient caissiers, préparateurs de commande, manutentionnaires, aides-soignants, infirmiers libéraux ou hospitaliers, personnels d’EHPAD, agents de propreté, ouvriers du bâtiments, agents de sécurité, professeurs des écoles, militants associatifs – et bien d’autres – ils sont au front. Bon gré mal gré, parce qu’ils sont mobilisés par devoir ou par obligation, la France pourra se relever grâce à la solidité de nos piliers.
La crise du coronavirus aura également permis de révéler un lourd secret de polichinelle. Les plus précaires restent les plus vulnérables face aux aléas du monde. Hier, nous parlions de réfugiés climatiques, et nous en reparlerons sûrement demain. Aujourd’hui, à l’instant T, une rumeur hurlante se répand comme une trainée de poudre. La presse se mobilise et décrit des situations alarmantes. Des familles qui peinent à se nourrir, des parents qui peinent à nourrir leurs enfants, alors qu’elles arrivaient laborieusement à joindre les deux bouts, notamment grâce aux cantines scolaires quasiment gratuites. Des personnes isolées géographiquement, limitées dans l’accès à leurs jardins partagés, effrayées par l’idée de souffrir de la faim. On révèle l’enfer de familles qui vivent dans des logements surpeuplés, parfois insalubres. La presse nous apprend également que les numéros d’urgence pour l’enfance en danger ou encore les femmes battues atteignent des records d’appels. Dans les quartiers pauvres de nos métropoles, la pandémie est encore plus présente du fait du mauvais accès aux soins et de la promiscuité, la désertification médicale y étant aussi forte que dans le périurbain ou la ruralité. Des circonstances plus que préoccupantes, dans la 6e puissance mondiale.
Cette crise aura par ailleurs permis de rappeler que le corps citoyen est plein de ressources, et qu’il est capable de se mobiliser et participer directement à la solidarité nationale. Que l’on couse des masques artisanaux, que l’on fasse un don à une association, ou simplement que l’on partage les bons gestes, le génie citoyen est démontré, bien qu’il s’efforce de côtoyer, parfois, la délation et les fausses informations.
Un génie citoyen renforcé par la relève d’une jeunesse française déterminée à faire de son espoir une réalité. Tous les indicateurs montrent que la jeunesse qui se mobilise se tourne avant tout vers l’associatif. Une démonstration, s’il y en avait besoin, du bouillonnement citoyen qui émerge chez la jeune génération. Et une démonstration qui permet de prévoir un passage de témoin intergénérationnel solide et pérenne, fondé sur le couple de la transmission et de l’innovation, pour relever les enjeux d’un système rongé par l’obsolescence programmée.
Chaque soir, quand le gong des 20h00 sonne, une partie des citoyens clape à l’unisson pour signifier sa gratitude pour les soignants. Une musique qui, nous l’espérons, résonne jusqu’aux oreilles de tous les piliers de notre société. Des applaudissements sincères, qui ne prônent ni la fracture ni la division, et qui pourront probablement faire progresser le partage de la valeur grâce à la reconnaissance de chacun, la place des citoyens dans la gouvernance nationale et locale, la cohésion nationale, et la fraternité.
Par Romain Labiaule, Membre de Synopia Jeunes
Étudiant en master 2 Développement et Territoire : ressource, politique, stratégie,
à l’Ecole d’Urbanisme de Paris