L’émotion qui nous étreint face au mal invisible qui nous assaille et frappe indistinctement serait-elle l’occasion d’une prise de conscience inespérée de la nécessité d’affronter durablement le dérèglement du climat ?
C’est la question à se poser au moment où les prix de l’essence atteignent des niveaux historiquement bas. Dont nous ne pouvons profiter puisque nous sommes confinés dans nos logements. A quoi cela sert-il de payer moins cher son carburant quand on est contraint à l’immobilisme ou que les prix du chauffage baissent alors que les beaux jours reviennent et entraînent une baisse naturelle de la consommation ?
Ce que les COP successives ont rêvé, le Coronavirus contribuera-t-il à le réaliser ?
Astreints à domicile, nous constatons lors de nos rares sorties combien l’atmosphère, notamment dans nos centres urbains, s’est améliorée. Les images satellitaires montrent chaque jour la disparition des nuages toxiques au-dessus de grandes métropoles comme Pékin ou New Delhi.
La fin de la guerre des prix entre certains états producteurs ne sera pas suffisante pour rétablir des prix jugés raisonnables. Au mieux, elle stabilisera les prix après leur chute brutale. C’est lorsque la demande remontera et que les stocks en train de se constituer massivement se résorberont que les prix des hydrocarbures pétroliers et gaziers retrouveront un niveau compatible avec la poursuite des investissements nécessaires à la reprise de la croissance. L’horizon s’éclaircira-t-il à l’automne 2020 ou faudra-t-il attendre le 1er semestre 2021 ? Les conditions du déconfinement en Europe auront un impact important. Mais en Amérique du Nord et naturellement en Asie elles seront déterminantes.
D’ici là, la chaine de distribution énergétique devra être en mesure de faire face à la reprise de la demande. Le moment venu, dans des conditions totales de sécurité. Les installations de production, les centrales électriques, les réseaux de distribution du gaz ou de l’électricité qui contribuent à l’ensemble de l’approvisionnement énergétique. Et dont le fonctionnement est indispensable aux besoins domestiques ou industriels doivent être maintenus à l’optimum.
Mais cette situation d’immobilité contrainte dans laquelle nous sommes entrés pour plusieurs semaines peut avoir des conséquences inattendues. Nous voyageons moins, mais était-il indispensable de voyager autant ? Le télétravail à domicile révèle ses atouts et nous nous habituons à un mode de fonctionnement efficace dont nous découvrons les avantages.
Quant à notre vie sociale, même limitée, elle a trouvé dans les outils numériques un moyen de raviver les contacts. Ainsi que l’intérêt que nous portons les uns envers les autres. Ainsi, une consommation énergétique individuelle en baisse contribuerait à accélérer l’efficacité énergétique indispensable pour atteindre les objectifs de décarbonation. Ce mal qui s’est abattu avec brutalité et de manière imprévisible pourrait générer des effets bénéfiques inattendus dans nos relations sociales. Mais aussi dans nos modes de vie et de consommation. Ce qui sera de nature à impacter favorablement le changement climatique.
Par Jérôme Ferrier, Membre du comité d’orientation de Synopia.
Président d’honneur de l’Union internationale de l’industrie du gaz