Il y a eu le temps de l’annonce, une sorte de réalité nouvelle qui nous frappe, les premiers jours du confinement, avec ses nouveaux rythmes, une expérience inédite, et là, honnêtement, trois semaines et un décalage horaire plus tard, un bon vieux coup de mou.
C’est étrange, mais les premiers jours du confinement étaient passés très vite. De nouvelles habitudes à prendre, un rythme à créer, une impression quelque peu euphorisante de vivre un moment historique, et, à son échelle d’en être acteur. Les chaînes d’information tournaient en boucle et nous étions en attente permanente d’actualités fraîches. C’était le temps des apéros skypes, des grasses matinées, des week-end à faire le grand rangement, la cuisine, à prendre des cours de piano sur internet.
Et puis, peu à peu, comme toujours, le temps a fait son œuvre. Le ménage dominical et le rangement sont redevenus des corvées. On se rappelle que l’on voulait vendre le piano faute d’usage réel, et les apéros skypes avec leur temps de chargement ont commencé à nous lasser.
Même le travail, ce fameux télétravail que notre employeur nous donnait au compte-goutte et qui constituait pour nous, à l’époque, la panacée du management, même ce télétravail perd son sens. Tout devient fictif. À quoi bon les reports, à quoi bon les team meeting quand, une fois l’écran fermé, on se retrouve en short, devant la table de la cuisine, à se demander ce que l’on fait.
On pensait à un sprint, on espérait un moment bref, quelques jours, des semaines au plus. Et on se retrouve dans un marathon. Dans ce trentième kilomètre, face au mur. Trop tard pour revenir, trop tôt pour arrêter. Alors on se projette, on imagine demain, on essaye de prendre de l’avance. Les vacances d’avril seront différentes, soit. Les ponts de mai seront singuliers, dont acte. Mais juin ?
Nous avons ce luxe de l’ennui sécurisé, et notre égoïsme nous fait lentement oublier que nombreux en France aimeraient l’avoir. On pense au personnel de santé, aux caissiers, à toutes ces personnes pour qui le confinement est une fiction. Et pourtant, même en sachant cela, on s’ennuie.
C’est pas grave, mais c’est comme ça.