Un long dimanche de quarantaine

Un long dimanche de quarantaine

C’est que l’on avait perdu l’habitude. Ne plus sortir. Rester chez soi. Etre comme suspendu au fil de l’information, en spectateur passif. L’histoire, pourtant, est parfois bien faite. Quelques heures avant les annonces gouvernementales, et le confinement placé en mode de vie,  les Editions de Minuit nous faisait parvenir le dernier livre d’Eric Chevillard, Monotobio. De quoi occuper un singulier week-end.

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« L’enchaînement des circonstances qui finit par former la trame de notre existence obéit à une logique terriblement simpliste. Pour un homme sagace, l’avenir est déjà une promenade dans le passé. » Il ne nous a pas fallu aller bien loin dans le dernier livre d’Eric Chevillard pour tomber sur ces lignes. Elles sont présentes dès le premier paragraphe. Et forcément on est tenté de leur prêter une dimension prophétique qu’elles n’ont bien évidemment pas la prétention d’avoir. Eric Chevillard n’est pas un Nostradamus moderne, mais un conteur d’histoires.

Pour celui qui ne s’est jamais plongé dans cette littérature, il y a toujours un temps d’adaptation à prévoir. Une sorte de rodage. Rien que le titre, déjà. Monotobio. On navigue entre le plat de sushi et le genre littéraire. Car c’est bien d’une autobiographie dont il est question dans ce livre. Avec un style et une structure volontairement déroutante, Eric Chevillard enchaîne les épisodes, feignant l’absence de logique. « Puisque la Terre est ronde, nous sommes toujours sur sa pente, et roulant vers l’abîme ».  L’auteur n’y est pour rien, c’est lui-même qui le dit.

Mais bon, il y la littérature d’un côté, et de l’autre, en boucle, les écrans de chaînes d’info. Une sorte de dualité du temps. Le temps long, celui des cent pas dans un appartement. Et le temps de l’instantané, fait d’annonces et de mesures. Et forcément, encore une fois, on est tenté de poser des ponts imaginaires entre les deux : « Tout se paye. Nous vivons sous la barre de l’addition, toujours occupés à régler nos factures, à tenter d’éviter la faillite »… Nostradamus quand tu nous tiens.

On aurait donc bien voulu s’essayer à la critique littéraire, mais quelque chose manquait, ou était en trop. Une forme de gravité dans l’air. On aurait aimé prendre l’auteur au mot « parfois au moins il existe une explication simple à l’enchaînement catastrophique des événements » mais on ne trouvait pas. Et puis disons-le, même si l’on adore lire Chevillard, réussir à en parler clairement est une autre paire de manches.

Alors que retiendra-t-on de ce roman. Pas grand chose hélas, et ce quand bien même le livre était bon. Pas grand chose donc si ce n’est qu’il nous a tenu compagnie et diverti un jour où on avait pas tout à fait la tête à rire.

« Et ma foi, quand la rampe de ce toboggan mène à la cave, on se félicite d’être le jouet de la fatalité ».

 

 

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