C’était en mai dernier. La loi Pacte entrait en vigueur et replaçait l’objet social au cœur de la proposition de valeur des entreprises. Cette nouvelle donne actait que, face aux nouvelles attentes citoyennes, face aux ruptures des modes de consommation. Face à un avenir marqué du sceau de l’engagement, la création de valeur économique ne pouvait plus être l’alpha et l’oméga de l’entreprise. Près d’un an plus tard, le ton est donné, affirmé, communiqué, et il porte un nom : la raison d’être.
« Il n’y a pas d’un côté le projet social de l’entreprise et, de l’autre, le projet économique. Les deux sont intrinsèquement liés » Emmanuel Faber, Directeur général de Danone. *
Car, face à ce qui pourrait être considéré comme un nouvel exercice de communication, une sorte de Responsabilité Sociale des Entreprises revisitée, se cache en réalité une réelle bascule, radicale, profonde et durable. Radicale parce qu’elle pose clairement un avant et un après. A l’heure de la transparence, à l’heure de la viralité, l’entreprise est, que l’on s’en réjouisse ou non, surveillée, attendue. Profonde aussi, parce qu’il ne s’agit définitivement pas d’un effet de mode, d’une tendance de marché, mais bien d’un mouvement de fond. Les signaux faibles étaient nombreux, latents, ils s’exposent aujourd’hui au grand jour. Durable enfin, parce que cette idée de temporalité lui est consubstantielle.
La raison d’être
Se détourner de ces enjeux, se détourner de ces sujets revient à tourner le dos à ses marchés, à son avenir. De même, considérer la nécessaire réflexion associée à la raison d’être comme un simple exercice de style, avec ses figures imposées et ses figures libres, c’est prendre le risque de créer un jeu, un no man’s land du sens entre l’entreprise et ses marchés. Au delà des grands principes et des beaux discours, la raison d’être c’est aussi, et peut être surtout, respecter certains principes de base comme le fait de payer ses fournisseurs ou prestataires en temps et en heure.
Il n’est ici pas question de taille, de chiffre d’affaires, de parts de marché. Si la raison d’être n’est pas l’apanage des grands groupes. Elle est le socle commun des entreprises qui réussissent – start-up et CAC 40, même combat. Le produit seul ne suffit plus. Un produit seul est par essence un lieu concurrentiel, une identité non. L’enjeu est de taille, et c’est par l’adhésion, et non pas la contrainte, qu’il pourra être relevé. Et cette citation de François-Henri Pinault « Si on arrivait à convaincre les 20 plus grands investisseurs mondiaux d’intégrer des critères environnementaux en plus des simples critères financiers, je vous promets qu’on ferait bouger les choses ». **
Le législateur a posé le cadre, les marchés ont posé les périmètres, l’opinion attend les engagements et surtout les effets mesurables de ces bonnes résolutions.