L’entrepreneuriat n’a jamais été aussi populaire. Selon le dernier baromètre mené en janvier 2020 par Opinionway pour le Salon des Entrepreneurs de Paris, événement organisé par le Groupe Les Echos – Le Parisien, près d’1 français sur 3 envisage de créer ou de reprendre une entreprise. Selon ce baromètre, plus de la moitié des Français déclarant vouloir créer leur entreprise (54%) sont prêts à le faire dans les deux années à venir. Par ailleurs, ils sont 31% à déjà avoir préparé leur projet. 4,6 millions de français sont donc prêts à débuter l’aventure entrepreneuriale. Rencontre avec Laurent Baccouche, Directeur général adjoint – Pôle Salons du Salon des Entrepreneurs et Éléonore Quarré, directrice d’études chez OpinionWay.
1 – Près d’un français sur trois envisage de créer ou reprendre une entreprise. Nous sommes donc 15 millions d’entrepreneurs potentiels. La France est-elle devenue une pépinière d’entrepreneurs ?
LB : Avec un record de 815 000 créations d’entreprise en 2019*, oui la dynamique d’entrepreneuriat est bien installée en France. On observe que l’esprit d’entreprise se développe de plus en plus, que ce soit pour des petits, moyens et grands projets, tous secteurs confondus. Nous avons réussi le pari, avec l’ensemble des acteurs, de donner aux Français l’envie d’entreprendre. Au-delà des mesures et aides déployées, il faut souligner que le contexte est plutôt favorable. En créant en quelques années d’innombrables opportunités de business, l’essor du numérique en est la parfaite illustration. Il permet de voir grand et vite, de repenser des secteurs entiers, d’imaginer de nouveaux services et produits, et surtout il abolit les frontières du business, les clients sont mondiaux ! Les jeunes, et les moins jeunes, l’ont très bien compris. L’enjeu de demain est désormais de les aider à grandir et d’accompagner leur développement.
EQ : Nous avons créé ce baromètre en 2000, soit un historique unique sur une période de 20 ans. C’est une vraie chance de voir évoluer depuis autant de temps l’intention de création d’entreprise. Dans nos différentes études, on constate une volonté grandissante d’entrepreneuriat, notamment chez les plus jeunes. Le mouvement que décrit Laurent a par ailleurs bénéficié de plusieurs facteurs : à la fois la réforme de l’assurance chômage en 2014, qui a facilité la création d’entreprise avec la possibilité de percevoir des allocations, mais aussi la conjoncture économique qui est devenue plus positive, ou en tout cas incitative, pour tous ceux qui portent des projets ou qui souhaitent se lancer. On peut évidemment ajouter à cela les mesures fiscales et sociales qui ont été prises par Emmanuel Macron en faveur de l’entrepreneuriat.
2 – A l’inverse, seul 15% des plus de cinquante ans envisagent de franchir le pas, comment expliquer ce différentiel et comment inverser cette tendance ?
EQ : Je ne parlerais pas d’une inversion de tendance. En réalité, si l’on reprend les chiffres de 2017 et 2018, 11% des 50 ans et plus envisageaient alors de créer leur entreprise, soit un chiffre qui ne bougeait pas. Avec 4 points de plus cette année, soit 15% de seniors qui veulent créer ou reprendre une entreprise, on observe une véritable tendance à la hausse. 15% c’est donc un chiffre important, surtout lorsque le chiffre d’ensemble ne connait pas une aussi bonne croissance.
LB : Oui, cela veut dire que la création d’entreprise n’est plus réservée aux entrepreneurs nés, on peut le devenir à tout moment, elle fait aujourd’hui partie intégrante du parcours professionnel. La création d’entreprise diffuse dans tous les secteurs et dans toutes les tranches d’âge.
EQ : Je précise d’ailleurs que la structure « 50 ans et + » n’a pas de borne, en tout cas supérieure, cela veut dire que dans cette tranche d’âge on a des retraités et des personnes très âgées qui sont désormais définitivement éloignées du marché du travail. Il faut donc considérer ce chiffre de 15% – qui paraît faible – en prenant en compte la structure de cette sous-catégorie de la population.
LB : Le passage de 11 à 15% est donc très positif et sûrement supérieur pour la tranche 50-65 ans ! Il faut souligner qu’à plus de 50 ans se lancer dans la création d’entreprise est encore plus audacieux que lorsqu’on est jeune. C’est un véritable engagement, un changement de vie qui suppose de remettre en question ses fondamentaux, ses acquis et pour certains mettre de côté une carrière de salarié qui comporte naturellement moins de risque pour soi, pour sa famille et ses proches. Alors saluons l’audace de ces séniors qui osent se lancer dans l’aventure entrepreneuriale ! Ce sont eux, qui par l’exemple de leur réussite, inspireront leurs congénères et susciteront de nouvelles vocations.
3 – En 2009, on lançait le statut d’auto-entrepreneur. A l’époque, 31% des français souhaitaient créer leur entreprise. 10 ans après ce chiffre stagne. Comment encourager et développer plus encore la fibre entrepreneuriale ?
EQ : Disons plutôt que le chiffre évolue, il ne stagne pas. Il y a eu des creux et des hausses. Dans les faits, le nombre de créations d’entreprises a augmenté (on était sur un record l’année dernière, qu’on vient de dépasser haut la main cette année), l’envie de créer des Français est donc là. Alors certes, on comptabilise quasiment autant de personnes qui ont envie de créer que les années passées, néanmoins on constate qu’elles sont désormais davantage à transformer l’essai et à passer à l’acte : plus de projets sont portés à terme.
LB : C’est bien évidemment la vision que nous partageons. Ce qui compte désormais c’est de passer à l’acte. Il faut multiplier les occasions de concrétiser les projets et les aider à grandir. Et c’est d’ailleurs (sinon on se répète cf 1ère ligne du §) l’ambition du Salon des Entrepreneurs, qui a lieu dans moins de 15 jours : favoriser les échanges, le partage d’expériences, la confrontation des idées, et bénéficier des conseils d’experts. En deux jours, il permet de rencontrer tout l’écosystème, et de se donner toutes les clés pour réussir sa nouvelle vie d’entrepreneur et d’auto-entrepreneur !
*baromètre Opinion Way, « Les Français, leur envie d’entreprendre et de développer leur entreprise », à l’occasion du Salon des Entrepreneurs de Paris, janvier 2020.