En matière de fidélisation des clients, assurer une prestation de qualité ne suffit pas…
Ce dirigeant d’une petite entreprise de service installée dans une zone industrielle de la banlieue lyonnaise se voit sollicité par un appel téléphonique interne :
– Jacques, il y a à l’accueil le représentant d’un fabricant de photocopieuses qui demande à vous voir. C’est pour vous faire une offre de service.
– Envoyez-le à Pierre s’il est disponible : c’est lui qui s’occupe des achats.
Notre dirigeant raccroche.
Cinq minutes plus tard, le téléphone sonne à nouveau :
– Jacques, c’est Pierre au téléphone. Je suis avec le vendeur et j’aimerais vous prendre cinq minutes. Est-ce possible ?
– Est-ce bien nécessaire ? Que je sache, nous sommes tous très satisfaits de notre fournisseur actuel…
Mais Pierre insiste. Le dirigeant, sachant que ce dernier n’a pas coutume de le déranger inutilement, accède à sa demande.
Prise de contact
Après s’être présenté, le vendeur tient à ses deux interlocuteurs le discours suivant :
– De part la nature de vos activités, j’ai pensé que vous étiez de gros consommateurs de photocopies et votre responsable des achats me l’a confirmé. Vous avez sept photocopieuses de capacité et d’utilisation différentes. C’est, m’a-t-il dit, un poste important de vos frais généraux.
Et se tournant vers le dirigeant, il conclut :
– Compte tenu de ces éléments, je vous propose de faire un tour dans votre établissement en compagnie de votre responsable et de vous faire gracieusement un rapide diagnostic de votre parc. Si je vois que je peux améliorer la situation existante, je me permettrai alors de vous faire une proposition. Si tel n’est pas le cas, vous aurez confirmation que votre solution actuelle est bien dimensionnée par rapport à vos besoins. Qu’en dites-vous ?
Prise de risque
Le dirigeant accepte l’offre faite et nos trois acteurs se retrouvent de nouveau une demi-heure plus tard. Le diagnostic est sans appel. Le commercial pointe un certain nombre de points faibles de la situation. Le coup de grâce arrive avec la photocopieuse située dans le couloir, face au bureau du dirigeant :
– Dîtes-moi, Monsieur, en face de votre bureau, dans le couloir, la photocopieuse en place, c’est bien vous et les trois bureaux voisins qui l’utilisent ?
– Oui.
– Et cela exclusivement pour une utilisation interne à votre entreprise ?
– Oui.
– Est-il vraiment nécessaire qu’elle vous fasse de la couleur ?
– Non.
– Vu le nombre relatif de tirages effectués sur cette machine, je pense qu’un gabarit plus petit irait très bien. Vous y gagneriez en budget et… en place dans le couloir.
La suite est facile à deviner. Le dirigeant se met à penser très fort à son fournisseur en place et à la personne qui passe tous les mois devant la porte ouverte de son bureau et qui le salue très gentiment avant de faire la maintenance de la photocopieuse… Le prix d’un toner couleur d’imprimante lui revient brusquement en mémoire. Depuis combien de temps cela dure-t-il ? L’entreprise changea de fournisseur.
Que s’est-il passé ?
Le dirigeant et son acheteur s’accommodaient de la solution « photocopieuses ». Pas de plaintes de la part des utilisateurs, une maintenance faite régulièrement en temps et en heure. Les factures sont importantes mais ce type de dépenses est dans les usages de la profession.
Il a suffi qu’un commercial efficace vienne créer le doute de façon concrète pour que nos deux acteurs basculent en phase « décision d’agir ». Changer de fournisseur en reprographie a été perçu comme une décision facile à prendre. L’insatisfaction est devenue présente et suffisante pour provoquer le changement.
Si le vendeur n’était pas passé ce jour-là, la situation aurait peut-être duré longtemps encore. Sa visite a été un moment à risque majeur pour le fournisseur en place… et un moment de vérité pour le client.
Que faut-il en penser ?
Il n’y a pas de situation acquise. Il ne suffit pas d’assurer avec professionnalisme la prestation vendue pour fidéliser un client. Questions, parmi d’autres, à se poser concernant tout fournisseur en place :
– Que représente la prestation aux yeux du client ? Elle lui est nécessaire ? Indispensable ?
– Qui d’autre que l’acheteur participe au choix du fournisseur (Utilisateurs, prescripteurs) ?
– Fait-on un point régulier avec son client sur l’évolution de ses besoins et attentes ?
– Est-on force de proposition ou laisse-t-on ce rôle de conseil à la concurrence ?