Smart City : quand le PDG de Vinci imagine la ville du futur

Smart City : quand le PDG de Vinci imagine la ville du futur

Aujourd’hui, sur les 7 milliards de Terriens, plus de 50% sont citadins. En 2050, ils seront 65%. Pour que la vie en ville ne se transforme pas en cauchemar collectif, le PDG de Vinci, Xavier Huillard, prodigue ses conseils et projette ses rêves afin de bâtir la ville de demain.

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150 jours de pluies acides par an dans une mégalopole saturée de véhicules autonomes, de robots policiers, cernée de vastes zones de non droit où règnent gangs et trafics. Ce monde à la Blade Runner est aussi déprimant que la Seahaven Island de The Truman Show où le personnage interprété par Jim Carrey vit dans une immense mascarade citadine ultra normée. La ville de demain ne sera ni l’un ni l’autre aux yeux de Xavier Huillard, président directeur général de Vinci depuis 2010.

Lors du Bpifrance Inno Génération le 11 octobre dernier, l’homme d’affaires français diplômé de l’École Polytechnique a livré le portrait-robot de sa ville idéale. Son questionnement est limpide : « comment reconstruire des villes vivables, durables, durablement vivables ? » Pour M. Huillard, elles seront construites sur un paradoxe. Se densifier tout en limitant leur étalement et en préservant les espaces naturels et agricoles. Pour relever le défi, celui qui est issu d’une famille de constructeurs et est lui-même ingénieur des ponts et chaussées, liste quatre points essentiels.

Les sous-sols, des espaces de vie à investir

« On a construit la ville sur la ville, sur la notion de l’ascenseur, mais on a condamné le sous-sol à des missions purement ‘servicielles’», martèle Xavier Huillard. Pour donner corps à son point de vue, il cite Dominique Perrault pour qui l’épiderme du sol peut aussi être un lieu de lumière. Cet architecte et urbaniste français voit les souterrains comme une « réserve d’innovations infinie ». Pour lui, leur exploitation ne doit pas se limiter aux sphères techniques et logistiques de nos besoins, mais bien être une ressource à part entière dédiée à étager la vie urbaine. Le sous-sol est une nouvelle dimension de la ville. Il préserve des espaces de respiration en surface (des aires paysagères notamment). Il accroit le terrain de la mobilité sans empiéter sur le bâti des surfaces.

Un bâti bâtisseur d’énergie

« Pour bâtir des villes beaucoup plus sobres en énergie, il faut changer de paradigme. Jusqu’à présent, les bâtiments sont au mieux passifs et souvent énergivores », déplore le président de Vinci. Ce dernier préconise d’en faire de véritables stockeurs d’énergie grâce aux nouvelles technologies.

Pourquoi ne pas miser sur les microgrids pour assurer l’équilibre avec du stockage intermédiaire ? Xavier Huillard défend en effet cette énergie décentralisée reposant sur un micro réseau local et intelligent. Les microgrids installés sur des constructions urbaines permettent de produire de l’énergie verte. Ils assurent même sa redistribution à l’échelle de la proximité.

L’agriculture urbaine, nouvelle (m)ère nourricière

Autre recommandation du patron de la multinationale spécialisée dans les métiers des concessions et de la construction : « il faut concevoir des villes beaucoup plus ouvertes à la biodiversité et à l’agriculture. (…) C’est hautement souhaitable, car il faut à tout prix casser les îlots de chaleur et rafraîchir l’atmosphère. » Le déploiement actuel de l’agriculture urbaine semble lui donner raison. Depuis deux ans, la mairie de Paris a multiplié les appels à projets pour végétaliser cent hectares intramuros, dont trente dédiés à cette forme d’agriculture.

Résultat ? La startup Cultivate est en train d’investir plus de 7 000 m2 de toitures dans le nord-est de la capitale. « De la serre au caddie, de la terre à l’assiette, le projet est un laboratoire grandeur nature pour l’émergence d’écosystèmes urbains d’un nouveau genre », affirment Sarah Msika et Sidney Delourme, les fondateurs de cette jeune entreprise agricole. Autre exemple cité par l’adjointe à la Maire chargée des espaces verts et de la nature en ville, le parking Raymond Queneau où Cycloponics fait pousser des champignons et des endives. En septembre 2018, Paris a également inauguré un potager de 2 500 m2 sur les toits de l’Opéra Bastille. La France reste néanmoins en retard sur le déploiement de cette forme d’agriculture, notamment face aux États-Unis. Rien qu’à Detroit, on recense 1 500 fermes et jardins urbains.

La mobilité autonome en partage

Sur le segment des itinéraires de moins de 50 kilomètres, 80% des usagers ont recours à leurs voitures individuelles, selon Xavier Huillard. Et d’ajouter : « Le véhicule autonome en autopartage va abolir la frontière entre voitures individuelles et transports collectifs. Et donc libérer des espaces en surface qui pourront être utilisés pour l’agriculture, la production et le stockage d’énergie. »

De quoi boucler la boucle. À condition toutefois que big data et blockchain soient mis à contribution de ces immenses chantiers contemporains. Autre prérogative pour M. Huillard, « aucune expertise, aucune technologie ne peut prétendre résoudre seule ces évidences. Le jeu du collectif est essentiel. (…) Dans les temps que nous vivons, il faut être à la fois structuré et foisonnant, local et global. S’incrire dans le temps long et court, accepter l’échec sans le multiplier. Il faut s’intéresser à l’individu et jouer collectif. Scientifiques, artistes et surtout nous entrepreneurs, nous avons des choses à faire ensemble pour inventer la ville de demain ». Encore faut-il oser s’en donner les moyens.

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