Au printemps dernier, une agence de voyage en ligne sicilienne, Easy Trapani enrichissait son catalogue avec un nouveau circuit qui promettait le grand frisson aux touristes. Le « Mafia Tour » , une plongée dans la mafia sicilienne avec le musée qui lui est dédié à Trapani, et la visite des maisons où les « parrains » de Cosa Nostra ont grandi.
Une initiative originale qui a attiré rapidement l’attention des internautes mais déclenché la colère des autorités locales en particulier le maire de Trapani qui a réclamé la fermeture du site. Le buzz était lancé.
Easy Trapani(1) s’est défendu en prenant la parole dans les médias et sur les réseaux sociaux. La mafia tue, le silence aussi », a rétorqué son dirigeant, citant le journaliste et poète italien Peppino Impastato, lui même victime de la mafia après l’avoir dénoncée.
Cinq mois plus tard, en dépit des vociférations des autorités, le « mafia tour » figure toujours en tête du catalogue du voyagiste. On peut penser que ce buzz a plutôt dynamisé l’activité de l’agence en renforçant sa visibilité au plan international. Un vrai good buzz au final.
Le buzz, pour émerger du brouhaha médiatique
Paradoxe du buzz, il peut sembler au regard des détracteurs mais s’avérer good pour l’entreprise qui en est l’objet. Si les détracteurs ne font pas partie de ses stake -holders (clients, salariés…) et n’ont pas de moyen de pression sur elle, le buzz représente un bon « coup » de publicité, le sacré graal des communicants. À l’inverse, s’il ne suscite qu’une minorité de critiques mais que les détracteurs font partie du cœur de cible de la clientèle, il peut virer au bad buzz.
De plus en plus d’entreprises, conscientes du potentiel d’un good buzz, semblent prêtes à courir le risque, en particulier les petites structures et les start-ups. Le nombre de créations de start-ups a progressé de 30% entre 2012 et 2015 (2).
Dans un contexte où elles fleurissent en nombre, ces « jeunes pousses » doivent se démener pour attirer l’attention des investisseurs à l’instar des fleurs qui rivalisent en couleurs et parfums pour attirer les abeilles à même de les polliniser et assurer leur reproduction. Le buzz est un moyen de se faire « repérer » rapidement par des investisseurs et d’attirer de nouveaux clients.
Il permet d’émerger du brouhaha médiatique. Au lieu de financer des campagnes publicitaires à plusieurs millions d’euros comme les grandes marques déjà établies, il « suffit » aux start-ups de trouver la bonne idée qui connaitra un destin viral sur la toile.
Mais la manipulation d’un virus n’est pas sans danger. La vague d’enthousiasme attendue peut muter en déferlante de colère. Pour éviter l’effet boomerang d’un buzz, mieux vaut bien connaître les sensibilités du web.
L’effet « gueule de bois »
Certaines thématiques sont taboues sur la toile, nombre de start-ups s’y sont brûlé les ailes. Le sujet ethnique figure en tête des sujets les plus buzzogènes en 2016.(3)
Début août, Wireless Lab, la start-up russe espérait surement faire le buzz en proposant de nouveaux filtres ethniques pour son application de retouche de selfies « FaceAPP ». Elle pensait probablement que ses utilisateurs s’enthousiasmeraient à l’idée de « changer de peau » et se transformer à volonté en asiatique, noir, indien ou caucasien.
Confrontée à une réaction d’indignation, Wireless Lab a dû rétropédaler en moins de 24 heures et supprimer ces filtres ethniques.
Si la prise en compte de la diversité ethnique peut créer un good buzz, il peut aussi générer de l’indignation : relayer des stéréotypes, masquer les caractéristiques physiques de certaines ethnies (ex choisir un modèle de femme asiatique avec les yeux dé-bridés….), ou à l’inverse caricaturer ces traits physiques, suffit à générer un bad buzz. Pour éviter le cauchemar mieux vaut se poser les bonnes questions avant de lancer une initiative (campagne de publicité, nouveau service….).
Good news, des outils prédictifs de bad buzz sont à la disposition des entreprises qui veulent piloter leur buzz pour éviter le crash.
1 Ecrit Gianni Grillo, propriétaire de l’agence de voyage sur son site internet
2 Selon le rapport d’activité 2015-2016 de l’Agence du numérique
3 http://mmc-communication-crise.com/spip.php?article61