Faire des milliardaires, premier supporteur de start-uppeur, PrésidEntrepreneur comme je l’ai moi-même écris. Fan de soirée en compagnie de créateurs d’entreprise, tout nous laisse à penser que notre nouveau Président sera le premier allié de ceux qui vivent avec l’esprit d’initiative chevillé au corps. [Le blog de Jacky Isabello]
Et en même temps lorsqu’on prend le temps de s’attarder sur les premières mesures qu’il met en œuvre par l’entremise de son gouvernement, il est aisé de s’apercevoir qu’elles sont violentes, voire mortifères pour les entrepreneurs. Il y a 5 ans presque jour pour jour, la révolte des Pigeons allait éclater. Le mouvement initié en dehors des corps intermédiaires syndicaux et politiques allait fortement s’opposer à François Hollande contre le projet de loi de finances et l’intégration au barème de l’impôt sur le revenu des plus-values de cessions mobilières, c’est-à-dire la revente de parts de société. Initiant ainsi une des nombreuses rebuffades que M. Hollande allait subir et des non moins nombreuses reculades qu’il allait opérer. Pas de pigeon, pas de frondeur pour l’instant mais ….
Tout d’abord, le gouvernement envisage de réduire les cotisations salariales en contrepartie d’une augmentation de la CSG. Paraphrasant M. Mailly secrétaire général de Force Ouvrière : « Certaines catégories de la population vont morfler avec cette hausse annoncée par le gouvernement pour 2018 ». Parmi elles les travailleurs non-salariés. C’est-à-dire les professions indépendantes, certains gérants de sociétés et quelques-autres. Selon l’Insee la France dénombre plus de 2,3 millions de professionnels indépendants.
Et Jean-Claude Mailly d’ajouter que la taxe d’habitation « On leur disait ce sera un peu compensé, pour une partie d’entre vous, par la taxe d’habitation. » Or le calendrier de la réforme de la taxe d’habitation, avec une suppression pour 80% des contribuables, une des mesures phare du candidat Macron, reportée puis repêchée par le gouvernement, ne brille pas par sa lisibilité, à ce stade. Les atermoiements des différents ministres font redouter le réveil du démon français de l’instabilité fiscale. Gérald Darmanin, ministre des comptes publics, avait ajouté que des mesures de compensation seraient prises pour les contribuables lésés par la hausse de la CSG, avant de conclure par un dévastateur « je ne sais pas lesquelles » s’est depuis montré sous un jour meilleur… Dont acte !
Ensuite, s’il parait évident de se réjouir de la fin annoncée du RSI, le très décrié Régime Social des Indépendants, et l’annonce attendue d’une réintégration des régimes de protection sociale des travailleurs non-salariés au régime général, dans les faits il n’en est rien. En effet, d’un RSI désintégré de la planète de la protection sociale résulterait une augmentation substantielle, pour 7 millions de Français qui en dépendent, de leurs cotisations sociales estimées au bas mot à 15-20% (version basse). Selon le site Europe 1 : « il faut faire attention car les cotisations à payer ne sont pas les mêmes. Sur 100 euros de recettes, Avec le RSI vous devez payer 40 euros de cotisations, c’est beaucoup. Avec, la Sécu, le régime général, il vous faut payer 60 euros de cotisations sur 100 euros de revenus. Et le journaliste de préciser : « Et donc, là, les Indépendants risquent de crier au racket. ». Racket…Pigeon ça se rapproche !
Enfin, qu’en est-il de la baisse de l’Impôt Société. S’il parlait, cet impôt exigerait de supprimer le droit de cuissage à son endroit tellement il est l’instrument fiscal le plus « tripoté » par la classe politique. Sa baisse fera immanquablement hurler le premier opposant déclaré à Emmanuel Macron, ce sans cravate, bouffeur de « Matheux » ; qui lui fera dire que seuls les patrons sont récompensés par le Président de la République. Figurez-vous que derrière cette baisse annoncée se cache peut-être un exercice de prestidigitation fiscale assez redoutable.
Aujourd’hui comment sont traités par l’impôt les bénéfices des entreprises ? C’est-à-dire la différence entre ce qu’elles vendent, le chiffre d’affaires, et ce qu’elles déduisent, leurs dépenses. Ils sont taxés selon un principe de progressivité. À 15 % en deçà de 38 120 €. Depuis la loi de Finances 2017 (vous voyez pourquoi je parlais de tripotage fiscale) à 28% entre 38 121 et 75 000€ et à 33,33 % au-delà de ce seuil. Le programme de M. Macron décrivait ainsi son ambition : « Nous baisserons l’impôt sur les sociétés de 33,3 % à 25 % pour rejoindre la moyenne européenne. […] En échange, nous défendrons au niveau européen une harmonisation des bases et une convergence du taux de l’impôt sur les sociétés pour éviter une course au moins-disant. »
Ce qui n’est pas explicité ce sont les intentions du gouvernement quant au maintien ou non du seuil à 15%. Et tout le risque est là. En effet la très large majorité des Très Petites Entreprises, celles employant moins de 11 salariés, et des sociétés unipersonnelles, réalise un bénéfice en deçà des 38 000€. Ce reliquat, constitue souvent la rémunération annuelle des dirigeants. Si ce taux intermédiaire à 15% disparaissait au profit d’un seul et unique taux à 25% sous couvert d’expliquer que le taux à 33% à disparu, plus des deux tiers des entrepreneurs non-salariés verraient leur impôt sur les sociétés augmenter de près de 66 % (et oui 10 points de plus lorsqu’un taux passe de 15% à 25% cela fait une augmentation insupportable de 66%). Messieurs comme disait Jacques Becker, « Touchez pas au Grisbi ».
Certes des promesses seront faites à ces forces vives de l’entrepreneuriat. On leur jurera le cœur sur la main que des mesures de compensation arriveront. Laissons-nous juger sur pièce. Ces acteurs économiques sont les sans-voix de l’économie. Elles sont souvent vilipendées par les opposants, leurs patrons caricaturés. Ils ne font jamais grève, ne manifestent que rarement dans la rue. Toutefois, ce sont les principales créatrices d’emplois. Durant cette longue période de crise qu’a connu le pays, ce sont les TPE qui ont le moins licencié. Les grandes entreprises anticipent très rapidement les mouvements de conjoncture.
Cela engendre une augmentation massive des suppressions d’emplois. Les TPE comme le rappelle un baromètre Fiducial (avril 2015 – à partir de la slide 74) des TPE vivent au quotidien le dialogue social. Leurs dirigeants baissent d’abord leur salaire avant de se résoudre à licencier. M. Le Président vous vous apprêtez à faire avaler trois grosses pilules aux entrepreneurs dont vous êtes encore l’un des héros. Les subtiles additions qui seront faites à la lecture de ce papier par ces travailleurs de l’entrepreneuriat séduits à priori par vos envies légitimes de réformes devraient quelque peu ternir leur bronzage naissant s’ils sont déjà allongés sur leur serviette de plage. Avant de définitivement gâcher leurs congés estivaux agissez Monsieur le Président.