Même s’ils restent les apôtres de la concurrence non faussée, les entrepreneurs ont aussi triché pendant leurs études. Ils nous racontent tout.
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« Oui, mais c’était très rare ». Même s’il y a prescription, les entrepreneurs n’aiment pas parler de leur triche d’étudiant. « Je ne fais pas l’apologie de la tricherie », prévient avec un sourire le fondateur de Meteojob, Philippe Deljurie. Une peur justifiée. La crainte d’être considéré comme un menteur, un filou, un truand, dans son métier de chef d’entreprise n’est jamais très loin. Mais, qu’ils se rassurent, ils sont loin d’être les seuls à avoir « bidonné » un examen.
Selon les chiffres du service interacadémique de la région Île-de-France des lycéens des examens et concours, le plagiat se « démocratise » chez les lycéens. Entre 2013 et 2014, le nombre de dossiers de « triche » transmis aux commissions a doublé. Des fraudes que l’on retrouve principalement dans le cadre des travaux personnels encadrés (TPE). Il est vrai qu’internet facilite la tâche des élèves paresseux. Les téléphones portables contribuent également au phénomène.
La calculatrice, meilleure amie du tricheur
Du temps de nos entrepreneurs, la calculatrice restait le meilleur copain du fraudeur. « Moi, tricher ? Bon oui, ça m’est arrivé parfois, lorsque les calculettes étaient autorisées. Mais, c’est une pure folie d’autoriser ces calculettes programmables quand on a des geeks en face de soi », raconte Maxime Fourny, président de Tribway et Tribway Consulting. Même l’arrivée du professeur ne lui faisait pas peur. « Tout était prévu pour pouvoir fermer rapidement le programme et qu’il soit suffisamment caché », ajoute-t-il.
Philippe Deljurie se souvient même du modèle de sa calculatrice : « c’était une HP 48 FX. On pouvait mettre toute la chimie organique. C’était vraiment notre meilleure amie. Celui qui n’avait pas ça, c’était compliqué pour lui », détaille-t-il avec un air dans la voix qui ressemble à de la nostalgie. Ce qui ne veut pas dire que les antisèches ont toujours fonctionné.
« J’ai appris la solidarité et le travail en équipe ! »
« J’ai fait des antisèches pour le bac que j’avais caché dans des feuilles de papier toilette. Mais le simple fait de les avoir sur moi faisait que je n’avais plus besoin d’elles. Par contre, je suis bien passé par la case toilettes. La peur m’a tellement vrillé le ventre… », raconte Dominique Palacci, dirigeant de Stimshop. On ne sort pas toujours grandi de ces histoires.
En revanche, Dominique Palacci avoue avoir déjà pompé à droite et à gauche pour avoir à finir un devoir sans trop se fouler. « C’était un sport permanent entre copains. Chacun avait plus ou moins sa spécialité et renseignait les autres. C’est comme ça que j’ai appris la solidarité et le travail en équipe ! ». Et ce n’est pas une justification.
« La transgression est saine si les valeurs qui l’animent le sont »
Dans bien des cas, la triche permet aussi de trouver des solutions. « C’est aussi ça le système D », avance le dirigeant de Météojob. L’entrepreneur distingue cependant la « triche » et la malhonnêteté. « Il m’est arrivé de perdre des appels d’offres à cause de pots-de-vin versés par un concurrent », nuance Philippe Deljurie. « Ça n’a rien à voir avec la triche d’école. Là, on parle d’enrichissement personnel ».
Une différence que l’on retrouve également chez Philippe Moreau, directeur d’Incuballiance : « la transgression est saine si les valeurs qui l’animent le sont ». Dans un cas, on apprend à jouer avec les contraintes pour se sortir de situations délicates. Dans l’autre, on fausse totalement le jeu et « on agit en mafieux », selon l’expression de Philippe Deljurie. En clair, s’il ne faut pas être malhonnête, il ne faut pas non plus être naïf. Ne dit-on pas : Trop bon, trop con.