Deux ans après la mise en place de la TVA à 5,5% dans le secteur de la restauration, Le gouvernement réaffirme sa position et annonce un bilan positif pour les professionnels du métier. L’opinion est pourtant mitigée sur l’intérêt de cette mesure : nouvelle niche fiscale coûteuse pour certains, création d’emplois et avancées sociales.
Des avantages et un intérêt peu perceptible pour l’opinion publique…
Rappel : en juillet 2009, la TVA passe de 19,6% à 5,5% sur certains produits de la restauration. L’idée du gouvernement est simple : faire revenir les clients, relancer l’économie en favorisant les recettes touristiques et estivales ; une mesure pour favoriser le secteur du tourisme à travers la restauration. Cette mesure n’a pas été appliquée à la lettre par les professionnels, qui se sont dès le départ inquiétés sur cet objectif de réduction des prix : pas toujours tenable selon certains petits restaurateurs. Au contraire, les grandes chaînes ont profité de ce « cadeau » fiscal pour le retourner en avantage commercial.
Ensuite, du côté des consommateurs, le changement sur l’addition n’a pas été très perceptible. Parmi les produits concernés : l’eau minérale, le café, ou les menus « plats du jour » et « enfant » qui devaient réduire les consommations quotidiennes. Mais si dans les premiers mois les prix affichés à la baisse étaient visibles pour le consommateur, ils ont difficilement perçu la différence sur le long terme. Entre changements de carte et inflation, difficile de mesurer les efforts réels des professionnels.
Autre critique, la mesure est jugée coûteuse pour les finances publiques et qui plus est, inefficace : la perte pour l’Etat est estimée à 2,4 milliards d’euros par an, pour une baisse insuffisante et invisible pour les consommateurs. La mesure coûterait donc davantage qu’elle ne rapporte, en créant au passage une nouvelle exception sur laquelle il sera difficile de revenir. Pour certains, c’est une nouvelle niche fiscale créée par le gouvernement.
A cela s’ajoute une création d’emplois qui n’a pas atteint les objectifs réellement fixés par le projet, et une hausse « faussement » attribuée à la baisse de la TVA. Le site internet spécialisé HR Infos rappelle à ce sujet qu’aucune étude « n’a mesuré les effets respectifs de la croissance et de la baisse de la TVA sur l’activité des cafés, hôtels et restaurants ». 13 900 postes ont été créés dans la branche Hébergement Restauration au premier trimestre 2011, « un chiffre record que le secrétaire d’Etat au Tourisme, Frédéric Lefebvre, s’est empressé d’attribuer à la baisse de la TVA » alors que la mesure ne seraient pas à elle seule « à l’origine de la totalité des recrutements nets constatés dans la période » souligne encore HR infos.
… mais une promesse pour les salariés du secteur
Le gouvernement a cependant tenu à réaffirmer le maintien de la TVA à 5,5%. Notamment, le secrétaire d’Etat chargé du tourisme, Frédéric Lefebvre, a signé en avril 2011 le renouvellement du « contrat d’avenir » établi avec les organisations professionnelles de la restauration : les engagements prévus dans ce contrat sont prolongés jusqu’en 2015. En contrepartie de la baisse de TVA, les organisations professionnelles de la restauration se sont engagées à créer 80 000 emplois supplémentaires en 4 ans dans la branche, à conclure 5 000 contrats d’apprentissage ou de professionnalisation supplémentaires par an, ainsi qu’à investir au moins 5 milliards d’euros d’ici au 1er juillet 2015, particulièrement dans les petits établissements.
De même, le président de la République Nicolas Sarkozy a profité d’une rencontre avec des professionnels du tourisme à Adge, pour renouveler son engagement. Il a été de nouveau catégorique sur la question de la TVA à 5,5% et ne souhaite pas revenir sur une « mesure économique qui a produit des effets. C’est un engagement que je prends » ajoute-t-il. En effet selon le chef de l’Etat, les professionnels « ont tenu leurs engagements » et « les rapports le montrent ». Pour Frédéric Lefebvre, secrétaire d’Etat en charge du commerce et de l’artisanat, cette mesure « a déjà produit des résultats très favorables » :
– L’objectif de création de 20 000 emplois pérennes en 24 mois a été dépassé, et la branche compte désormais 44 600 emplois de plus qu’en juillet 2009;
– Les défaillances d’entreprises ont diminué fortement à partir de l’été 2009 (-17,6% de défaillance d’entreprise après son application);
– Un accord social majeur, signé le 15 décembre 2009, permet de redistribuer un milliard d’euros par an aux salariés du secteur, grâce à une augmentation moyenne de la grille de salaires de 5 %, à la création d’une prime TVA, et à l’octroi de 2 jours de congés supplémentaires;
– Concernant la protection sociale, l’entrée en vigueur, depuis le 1er janvier 2011 d’une mutuelle « frais de santé », obligatoire pour toutes les entreprises du secteur est également une avancée majeure pour les salariés.
Ces données viennent appuyer la ligne politique adoptée par le gouvernement visant à favoriser le tourisme. Nicolas Sarkozy affirme notamment son caractère porteur : c’est « un secteur d’avenir et un secteur majeur pour l’économie française», soulignant que « les dépenses touristiques, c’est 6% de notre PIB ». La France est en effet d’ores et déjà le pays d’Europe le plus fréquenté par les touristes, avec 76,8 millions de visiteurs étrangers en 2010.
De même, Frédéric Lefebvre a affirmé le 26 juillet que « le secteur de la restauration dans toutes ses composantes, est le premier recruteur de notre pays depuis plusieurs mois constitue un moteur de la croissance de notre pays. L’avenant au contrat d’avenir a permis des avancées très significatives, en particulier dans le domaine social, avec des engagements portant sur 80 000 nouveaux emplois, 20 000 nouveaux postes d’apprentis et de contrats de professionnalisation. Renoncer à la TVA à taux réduit dans la restauration reviendrait à renoncer à ces nouvelles avancées».
Verdict en 2015…